Présenté à la Semaine de la Critique, ce deuxième long métrage irlandais plonge un jeune couple dans un cauchemar dystopique étouffant
Jeune couple recherche maison. Tel pourrait être le sous- titre de ce deuxième long métrage de l’Irlandais Lorcan Finnegan (son premier, Without name, est resté inédit en France) qui prolonge son court métrage de 2011, Foxes, où il explorait – déjà en mode surnaturel – le phénomène des lotissements fantômes dans son pays
C’est donc dans un de ces lotissements que le jeune couple incarné par Jesse Eisenberg et Imogen Poots se retrouve entraîné par un agent immobilier au comportement bien trop obséquieux pour être honnête. Ils en ont conscience d’ailleurs mais s’en amusent avant que le piège ne se referme sur eux. Imaginez le village du Prisonnier entièrement vide et revisité par le peintre Magritte et vous aurez une petite idée du lotissement dans lequel s’aventure sans méfiance ce jeune couple. Jusqu’à ce que soudain, alors qu’ils déambulent dans la fameuse maison à vendre, l’agent immobilier disparaît comme par enchantement. Logiquement, ils vont pour repartir à leur tour mais se retrouvent comme enfermés dans un labyrinthe à ciel ouvert insoluble, leur voiture les ramenant inlassablement devant ladite maison. Le piège se referme et l’angoisse va décupler quand après une nuit passée sur place, ils trouvent sur le palier un paquet contenant… un bébé et un petit mot leur indiquant qu’ils seront peut être libres s’ils l’élèvent !
Vivarium évolue en terrain connu des amateurs de SF. En disciple et héritier de La Quatrième dimension et Black mirror, avec cette idée commune de partir d’une question sociétale concrète pour développer un récit de science- fiction surréaliste. Dire qu’il révolutionne le genre serait mentir. Mais dans cet univers ultra- codifié, il réussit l’essentiel : tenir en haleine, installer un climat angoissant sans jamais jouer à faire sursauter gratuitement le spectateur, faire monter la pression par une gestion habile des rebondissements en montrant ce couple peu à peu rongé de l’intérieur par la gestion de ce gamin tout à la fois terriblement humain (il hurle, fait des caprices…) et effroyablement inhumain tel un alien tête à claques aux dents bien trop blanches et à la mèche toujours impeccable que le « père » a envie d’étrangler et la « mère » de protéger. Avec une dose d’humour noir savamment distillée et une direction artistique particulièrement soignée, Lorcan Finnegan raconte donc ici en mode dystopique ce qui nourrit les angoisses des jeunes trentenaires d’aujourd’hui dans un monde de plus en plus incertain. Ce besoin impérieux de trouver un toit – avant que les tarifs ne deviennent inaccessibles - pour se préserver du risque permanent du déclassement et la pression d’être des parents parfaits même si ce sentiment paternel ou maternel vous est étranger. Certains reprocheront au film une certaine lenteur. Mais c’est précisément ce rythme qui fait naître cette atmosphère d’autant plus angoissante qu’elle paraît enveloppante. Et ce sans jamais frôler - comme Little Joe, présenté hier en compétition et autre héritier de Black mirror - l’encéphalogramme plat neurasthénique.
Enfin, last but not least, ce film peut s’appuyer sur un duo de comédiens épatants qui trouvent à chaque scène le ton juste alors que l’ascenseur émotionnel joue aux montagnes russes tout au long de ce récit. Jesse Eisenberg et Imogen Poots sont de grands comédiens. Ce n’est pas un scoop. Mais le bonheur à les voir évoluer sur un grand écran fait oublier les scories d'un film indubitablement imparfait mais prenant.
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