Gravity, Nicolas Cage, Scarlett Johansson... Tous les chocs de Venise 2013
James Franco s’impose
Certains, peu convaincus par As I Lay Dying (son adaptation arty de <strong>William Faulkner</strong>) doutaient encore des qualités de cinéastes de <strong>James Franco</strong>. Mais Child of God séduit : en adaptant Cormac McCarthy, Franco décrit la déshumanisation progressive d?un exclu avec <strong>un sens de la violence et un talent certain</strong> pour capter l?essence (paysagère et spirituelle) de l?americana white trash. Les festivaliers sont divisés face à l?interprétation excessive de l?acteur principal Scott Haze, qui verse généreusement presque toutes ses substances corporelles à l?exception de son sang.
Les hauteurs de Gravity
C?est le film événement de cette Mostra. <strong>George Clooney</strong>, <strong>Sandra Bullock</strong> et <strong>Alfonso Cuaron</strong> ouvrent la 70ème édition du plus vieux festival de cinéma du monde avec Gravity, un film qui élève le niveau à des hauteurs cosmiques. Un film d?espace qui laissent les spectateurs en apesanteur : extraordinaire expérience sensorielle qui propulse la 3D à des niveaux jusque là insoupçonnés (même <strong>James Cameron</strong> sera forcé d?admettre que le film de Cuaron est une étape dans le cinéma), <em>Gravity</em> -qui raconte comment une mission tourne mal, et ce qu?un individu est prêt à faire pour s?en sortir- est une métaphore des difficultés de l?existence. <strong>Ici, on dit même « un chef d??uvre universel »</strong>. Après une telle ouverture, difficile de continuer...
Miyazaki au sommet
On reprend la direction des cieux avec Le Vent se lève, il faut tenter de vivre, chef d??uvre du maître de l?animation <strong>Hayao Miyazaki</strong>. L?histoire est inspirée de la vie de Jiro Horikoshi, probablement le plus brillant des ingénieurs aéronautiques japonais, célèbre pour avoir mis au point l?avion de chasse Zéro. Mêlant rêve et fable documentaire, le film (qui fait beaucoup penser à Porco Rosso) est l?un des plus réalistes et des plus adultes de l?animateur. Un autre chef d??uvre donc, suivi d?une annonce qui marquera la Mostra ; selon le directeur du studio Ghibli, Miyazaki a décidé de prendre sa retraite après ce film qui devrait être son dernier. <strong>Annonce à prendre avec circonspection</strong> : depuis une vingtaine d?années, le cinéaste répète la même chose après chaque film.
Moebius ne tourne pas rond
Autre retour, celui de <strong>Kim Ki-Duk</strong>. Son dernier film, Pieta (Lion d?Or à Venise 2012) était une oeuvre désespérée. Moebius est une comédie noire, trash et sexuelle, qui rend hommage au slapstick avec <strong>un sens de la provoc et du cinéma réjouissant</strong>. Pour l?anecdote, pas moins de 3 pénis sont sectionnés dans ce drame oedipien. Rigolo ? En interview, le réalisateur affirmera qu?il n?a pas forcément cherché à faire rire.
Nicolas Cage dans Joe
Hommagié à Deauville, célébré à Venise ! <strong>Nicolas Cage</strong> est partout. Et surtout (et très bon) dans Joe, le nouveau film de <strong>David Gordon Green</strong>. Adapté d?un roman de <strong>Larry Brown</strong>, Joe raconte l'histoire d?un seigneur local white trash, joué par Cage : ancien taulard qui a plongé pour avoir rossé des flics abusifs, il donne du travail à ceux qui en veulent, et calme ses bouffées de colère à coup d?alcool, de tabac et de putes. Un jour, il se prend d?affection pour un gamin? Lorsque le père du môme (clodo joué par un type réellement terrifiant) s?en mêle, Joe se retrouve attaqué de toutes parts? <strong>Nicolas Cage</strong> est parfait, manifestant les différentes nuances de son personnage, mais bizarrement, il ne fait pas toujours le poids face à la réalité. Le mélange d?artifice et de réalisme râpeux est d'ailleurs ce qui fait l?intérêt de ce drôle de film.
La restauration de Sorcerer
Film maudit de <strong>William Friedkin</strong>, <em>Sorcerer</em> ? Le Convoi de la peur en VF, remake du Salaire de la peur de <strong>Clouzot</strong> - renaissait de ses cendres à la Mostra. A partir d?un scan 4K du négatif original 35mm du film, la Warner offrait à ce chef d'oeuvre méconnu une restauration supervisée par Friedkin lui-même. Le résultat est stupéfiant et rend justice à un film immense, sauvage et violent, chant du cygne d?un certain cinéma hollywoodien. A Venise, on (re)découvrait enfin l?un des derniers élans créatifs du Nouvel Hollywood, un diamant témoin d'une époque où les mavericks 70?s imaginaient des films monstres, hypertrophiés et inégaux (La Porte du Paradis, Apocalypse Now,1941?)? Pour le faire court, <em>Sorcerer </em>est à Friedkin ce que Apocalypse Now est à Coppola.
Tom à la ferme et Xavier à Venise
Comme toujours <strong>Xavier Dolan</strong> impressionne autant qu?il énerve. Tom à la ferme, adaptation d?une pièce de théatre sur le déni homosexuel, est un exercice de style hitchcockien nerveux, brillant, et qui, dès sa projection, s?installe parmi la short list des favoris au palmarès. Dolan dans le film arbore des cheveux frisés blonds mi-longs qui le font ressembler (en version maigre) à un chanteur de hard rock australien des années 70. En interview, l?acteur réalisateur narcissique a les cheveux ras.
Johansson dans la peau
<strong>Scarlett Johansson</strong> en croqueuse d?homme. C?est le pari de <strong>Jonathan Glazer</strong> qui avait fait de la Kidman une mère troublée et troublante dans son beau Birth. Là, dans Under the skin, il transforme la Veuve Noire en mante religieuse. Le film inquiète, dérange (entre horreur, SF et thriller) et laisse les spectateurs indécis. Seule certitude : Johansson livre <strong>une de ses prestations les plus bluffante</strong>s.
Moins que Zéro ?
<strong>Terry Gilliam</strong> revient ! Avec Zero Theorem, retour à la SF proche de Brazil. <strong>Christoph Waltz</strong> dans le rôle du nerd isolé sur son ordinateur impressionne plus que le film - qui laisse un peu sur sa faim malgré <strong>son univers visuel d'une force impressionnante</strong>.
Le best of de Venise 2013
<strong>Sandra Bullock</strong> et <strong>George Clooney</strong> perdus dans l'espace, <strong>Scarlett Johansson</strong> en alien mangeuse d'hommes, <strong>Nicolas Cage</strong> enfin sobre, <strong>Hayao Miyazaki</strong> libre comme l'air, <strong>Xavier Dolan</strong> à la ferme, <strong>Kim Ki-Duk</strong> castrateur, un chef-d'oeuvre de <strong>William Friedkin</strong> enfin restauré, <strong>James Franco</strong> qui confirme son talent de réalisateur, <strong>CHristoph Waltz</strong> donne le meilleur de lui-même pour <strong>Terry Gilliam</strong>... Voilà les chocs de la 70ème Mostra de Venise. Petit résumé avant le palmarès de ce soir.
Sandra Bullock et George Clooney perdus dans l'espace, Scarlett Johansson en alien mangeuse d'hommes, Nicolas Cage enfin sobre, Hayao Miyazaki libre comme l'air, Xavier Dolan à la ferme, Kim Ki-Duk castrateur, un chef-d'oeuvre de William Friedkin enfin restauré, James Franco qui confirme son talent de réalisateur, CHristoph Waltz donne le meilleur de lui-même pour Terry Gilliam... Voilà les chocs de la 70ème Mostra de Venise. Petit résumé avant le palmarès de ce soir.
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