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Le film de Maïwenn est diffusé ce soir à 20h55 sur Canal+.

Mon roi est une love story. L'histoire d'un amour destructeur dont il est quasi impossible de se libérer. Mais c’est surtout le portrait d’un homme par une femme - un portrait qui tourne au procès. Elle, Tony, incarnée par Emmanuelle Bercot, est d’ailleurs avocate. Lui, Giorgio (incroyable Vincent Cassel) est un homme compliqué, ambivalent, charmant, détestable, beau et dégueulasse ; un pervers narcissique. Le roi du titre, c’est pour « le roi des connards », ce que Cassel admet être dès le départ ; pourtant, il reste décliné au possessif. C’est donc une femme amoureuse et blessée qui va juger un connard, mais son connard, avec ce que ça implique de mauvaise foi et de circonstances atténuantes. Elle l’accuse ou le défend selon les hauts et les bas de leur histoire et sa profession d’avocate (à laquelle on ne croit pas vraiment par ailleurs) n’existe sans doute que pour souligner le dispositif presque procédural du scénario. Malgré des faiblesses d’écriture, malgré le manque de finesse de certaines idées (la blessure physique de Tony et sa convalescence qui figurent avec des gros warnings la souffrance morale et le processus de guérison d’un cœur meurtri), Mon roi est ponctué de séquences fortes qui donnent à l’ensemble le goût de la réalité : la rencontre, les engueulades, les conversations sur l’oreiller, les déchirements, les renoncements… Ce portrait-procès d’un homme dangereux par sa victime consentante touche à des vérités profondément intimes rarement exposées à l’écran.

Maïwenn : "Mon roi aurait dû être mon premier film"

Pour la première fois, Maïwenn ne se met pas en scène. Mais elle choisit sa partenaire d’écriture sur Polisse, par ailleurs réalisatrice, pour en faire son double. Car la cinéaste ne se met pas à l’écran mais elle met en revanche, comme toujours, ses tripes, son hystérie, son égo et sa sensibilité, et elle ne pouvait sans doute pas laisser une autre actrice qu’Emmanuelle Bercot, en qui elle a confiance et qui est aussi cinéaste, les prendre en charge. Comme toujours, sauf que cette fois il s’agit d’une histoire d’amour, ce qui donne une autre dimension à la sensibilité toute personnelle de Maïwenn : ce qui fait la force et la rareté de Mon roi est la nature du regard, un regard féminin sur un homme, une histoire d’amour vécue par une femme et filmée par une femme – faites le compte, on n’en voit pas si souvent. On le vit presque comme une inversion du point de vue, car Maïwenn filme Cassel comme on a l’habitude qu’un homme filme une femme, avec la même fascination, le même désir, la même sensualité. Les moments où cette promesse est tenue par la mise en scène sont d’ailleurs de purs instants de grâce : quand la caméra caresse le visage, les mains, la nuque de Cassel à la fin, après dix ans de drame et de fureur, avec un amour et un désir intacts, le film devient carrément bouleversant. Et touche  à une vérité troublante, un constat apaisé et pourtant effrayant, de l’impossibilité d’être heureux en amour.

Mon roi de Maïwenn avec Emmanuelle Bercot, Vincent Cassel, Louis Garrel est diffusé ce 4 octobre sur Canal+.