Ramata-Toulaye Sy
Kalidou Sy

Un premier film, et déjà une sélection en compétition officielle face aux cadors du Festival.

Apparaître en compétition officielle au Festival de Cannes avec un premier film est quelque chose d’exceptionnel, tant les cadors habituels semblent prendre de la place au sein de cette section. Nanni Moretti, Martin Scorsese, Wim Wenders, Aki Kaurismäki… Le dernier cinéaste à avoir réussi à se glisser en compétition avec un premier film était Lady Ly avec Les Misérables. L’idée est désormais réactualisée avec la sélection du premier film de Ramata-Toulaye Sy, Banel et Adama, le seul et unique de cette 76ème édition.

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Les premiers films de cinéastes en devenir figurent la plupart du temps dans la section Un Certain Regard, ou bien dans des sélections parallèles, tels que La Semaine de la Critique, La Quinzaine des Réalisateurs ou encore l’Acid. Ramata-Toulaye Sy a pourtant réussi à dépasser les attentes en se plaçant directement en compétition. Si Banel & Adama est le premier long-métrage de la réalisatrice française d'origine sénégalaise, son scénario est pourtant prêt depuis de nombreuses années, comme elle l’avait raconté l’année dernière dans le cadre d’un entretien avec le CNC. Le film correspond au scénario de fin d’études de la jeune femme, sorti directement des rangs de la FEMIS, l’une des écoles de cinéma les plus réputées au monde, à Paris.

Pourtant, avant de se lancer dans la réalisation d’un long métrage, ses producteurs la poussent à écrire un premier court-métrage. Elle tente au départ de transformer l’intrigue de Banel & Adama en format court, mais en vain. Expérience frustrante pour la jeune cinéaste : “Alors que, mon scénario de long-métrage était déjà prêt, j’avais l’impression d’avoir déjà tout raconté, donc essayer d’en faire un court-métrage, ça semblait un geste forcé et frustrant", comme elle le racontait pour le CNC.

Elle se lance alors dans l’écriture d’un autre court-métrage, Astel, qui retient un moment-clé de son long-métrage. “Pour moi, on ne se pose pas du tout les mêmes questions, de l’un à l’autre. Sur les longs-métrages, on a vraiment le temps de développer une intrigue, des personnages alors que les courts-métrages doivent surtout être efficaces émotionnellement. C’est pourquoi j’ai décidé de raconter seulement un moment clé dans Astel. Cette étape décisive dans la vie des jeunes filles, à travers le monde, qu’est la désillusion du passage de l’enfance à l’adolescence.” avait-elle alors expliqué. Succès fou pour le film, qui remporte le Prix SACD de la meilleure première œuvre de fiction et le Prix spécial du jury compétition nationale au Festival international du court-métrage de Clermont-Ferrand en 2022.

Pas étonnant donc que Banel & Adama, “qui est à la lisière de l’expérimentation, et [qui est] une offre de cinéma forte et singulière”, selon les mots de Thierry Frémaux, ait séduit le comité de sélection cannois, qui entend (re)mettre à l’honneur le cinéma d’Afrique Subsaharienne sur la carte du cinéma mondial. Ramata Toulaye-Sy est la “deuxième jeune cinéaste sénégalaise qui vient en compétition après Mati Diop.” (Pourtant, Ramata-Toulaye Sy est en réalité française “je suis française, que je suis née et j’ai grandi ici.”). Il ne reste désormais plus qu’à attendre de voir si la jeune cinéaste repartira avec un prix.

Le 76ème Festival de Cannes aura lieu du 16 au 27 mai prochain.

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