A Hollywood, il l'avait remercié en tant qu'une de ses trois inspirations majeures en allant chercher son Oscar pour La Grande Bellezza, aux côtés de Federico Fellini et Martin Scorsese. A Cannes, Paolo Sorrentino rend une fois encore hommage à Diego Maradona dans Youth, présenté aujourd'hui en compétition.
Un dos massif, adipeux, sur lequel descendent des cheveux en bataille tente péniblement de sortir de la piscine. Au fur et à mesure qu'il émerge de l'eau, un tatouage géant de Karl Marx se dessine. On le conduit jusqu'à un transat sur lequel il s'échoue et reprend lentement son souffle à l'aide d'un masque à oxygène. On s'interroge. Puis plus. Il s'agit bien d'un double de Maradona. La légende du foot hante le luxueux hôtel aux airs de sanatorium dans lequel un grand compositeur et chef d'orchestre à la retraite (Michael Caine), un vieux cinéaste en quête de son film testamentaire (Harvey Keitel) et un jeune acteur en quête du sens de son métier (Paul Dano) passent leurs vacances. Et des alentours duquel Youth ne s'éloigne jamais. Tant mieux : on n'a jamais eu autant envie d'aller en Suisse qu'en la découvrant filmée par Paolo Sorrentino.
Avec Youth, Sorrentino choisit définitivement le désir
Après sa première séquence douloureuse, on pourrait croire que le cinéaste italien a décidé de se payer son idole. D'autant qu'un peu plus tard, alors qu'un jeune apprenti violoniste, gaucher, vient remercier le vieux chef d'orchestre pour son conseil dans la tenue de son archer, le monstre s'approche et déclare, comme une révélation : "Moi aussi je suis gaucher". Ce à quoi le personnage de Paul Dano répond, presque consterné, que le monde entier sait qu'il est gaucher (d'autant plus avec sa "main de Dieu", mise de la main gauche). Et pourtant. Il le filme cruellement vieilli et abîmé, et lui offre une scène magique dans laquelle El Pibe De Oro jongle avec une balle de tennis dans un instant de joie et de grâce absolument jouissif. Qui dit que si ce n'est la jeunesse, au moins le génie est éternel.
Et c'est ce qu'on entend (entre autres) dire Paolo Sorrentino, qui porte un regard thaumaturge sur la vieillesse et sublime Michael Caine ; dont on se dit avec bonheur qu'il est devenu un très beau vieux et à qui il offre une rédemption finale poignante et spectaculaire.
Malgré les apparences, Youth porte extrêmement bien son titre.
Vanina Arrighi de Casanova
Youth de Paolo Sorrentino avec Michael Caine, Harvey Keitel, Paul Dano et Rachel Weisz est présenté en compétition à Cannes et sortira dans les salles françaises le 30 septembre prochain.
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