Guide du 8 janvier 2020
Bac Films / Diaphana Distribution / Cinéma Public Films

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

LES SIFFLEURS ★★★☆☆
De Corneliu Porumboiu

L’essentiel
Le cinéaste roumain farceur Corneliu Porumboiu signe un polar qui navigue entre burlesque et série noire.

La corruption est la thématique favorite du cinéma roumain, et du cinéma des ex-pays de l’Est en général. Le sarcastique Corneliu Porumboiu (auteur du génial 12 h 08 à l’est de Bucarest) en fait un élément comique puisque dans Les Siffleurs tout le monde est plus ou moins pourri, à commencer par le héros, un flic en cheville avec des mafieux.
Christophe Narbonne

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PREMIÈRE A ADORÉ

L’EXTRAORDINAIRE VOYAGE DE MARONA ★★★★☆
De Anca Damian

Habituée d’un cinéma d’animation adulte (Le Voyage de monsieur Crulic et La Montagne magique), Anca Damian s’aventure pour la première fois sur un terrain plus enfantin. À partir d’une intrigue simplissime (renversée par une voiture, une chienne se remémore les différents maîtres qu’elle a aimés), elle signe une oeuvre à la beauté plastique renversante en mêlant les techniques (2D, 3D, papiers découpés...) avec une dextérité inouïe et sans jamais donner l’impression de se perdre. Car ce travail formel bluffant n’est jamais gratuit mais au service d’un récit qu’il densifie et protège de tout débordement mièvre. On guette chaque nouvelle saynète en se demandant ce que la réalisatrice va bien pouvoir imaginer. Et jamais elle ne bégaie ou s’endort sur ses lauriers. Un tour de force.
Thierry Cheze

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PREMIÈRE A AIMÉ

LES ENFANTS DU TEMPS ★★★☆☆
De Makoto Shinkai

Que faire après avoir signé le plus gros succès mondial de tous les temps de l’histoire du cinéma d’animation japonais (ouf, quelle phrase !) ? C’est le drame qui attendait Makoto Shinkai, après son totalement stupéfiant et magnifique Your Name (2016). Voilà donc l’histoire d’un lycéen fugueur devenu journaliste malgré lui, qui fait la connaissance d’une jeune fille capable de faire cesser, pendant de brefs moments, la pluie sans fin qui inonde le Japon.
Sylvestre Picard

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TOMMASO ★★★☆☆
D’Abel Ferrara

Comment va Abel Ferrara ? Pour les fidèles qui se poseraient la question, Tommaso tient lieu de bilan de santé, sous la forme d’une carte postale envoyée de Rome, son nouveau chez lui. Le réalisateur s’y portraiture sous les traits de l’ami Willem Dafoe, en artiste exilé, fuyant ses démons, hanté par la culpabilité des années de défonce, essayant de mener une vie normale avec sa femme et sa fille (Cristina Chiriac et la petite Anna Ferrara dans leurs quasi propres rôles). Tommaso touche par son mélange de violence et de douceur, l’indolence superbe d’un Dafoe de plus en plus buriné, de plus en plus beau. C’est un film léger comme une plume, un cadeau pour les fans. Et on préfère infiniment voir son auteur tourner ça qu’un DTV putassier sur DSK. Comment va Abel Ferrara ? L’espace d’un instant, devant Tommaso, on pourrait presque l’imaginer heureux.
Frédéric Foubert

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

NINA WU ★★☆☆☆
De Midi Z

Après le superbe Adieu Mandalay, on attendait avec impatience le nouveau film du Taïwanais Midi Z, auréolé de sa première sélection cannoise. On y suit une actrice sur le point de décrocher enfin le rôle principal d’un film et qui, bien que réticente devant les scènes de sexe, se rend au casting, sans se douter des dommages collatéraux violents de sa décision. Jusque-là auteur de ses scénarios, Midi Z s’empare de celui d’un autre. Mauvaise pioche. Car si on retrouve l’inventivité de sa mise en scène – croisement électrique entre les univers de David Lynch et de Wong Kar-Wai – dans les scènes de cauchemars fantasmés, on reste sur sa faim dès que la réalité frappe à la porte dans cette histoire inspirée par l’affaire Weinstein. Si habile d’habitude à transcender cette réalité dans ses portraits sans fard de son pays, Midi Z martèle ici les choses et manque en partie sa cible.
Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

L’ADIEU ★☆☆☆☆
De Lulu Wang

Vingt millions de recettes pour trois millions de budget, L’Adieu a été l’un des cartons surprises de 2019 aux USA. Il faut dire que Lulu Wang n’a pas lésiné sur la guimauve dans ce mélo sur le retour en Chine d’une Sino-Américaine pour faire ses adieux à sa grand-mère atteinte d’un cancer que toute sa famille lui cache. Faire chialer Margot semble la seule quête d’une réalisatrice qui noie sous une BO dégoulinante les thématiques pourtant intéressantes qu’elle aborde, dont la quasi-impossibilité de se reconnecter au mode de vie chinois quand on s’est exilé. De plus, ce film « basé sur un vrai mensonge » ne manque pas de malice. Mais il n’en joue pas assez et laisse le plus terrible des regrets : se dire devant son plan final que cette histoire aurait mérité un (vrai faux ?) docu au lieu de cette friandise nappée de larmes de crocodile. Mais le box-office n’aurait pas été le même.
Thierry Cheze

UN VRAI BONHOMME
★☆☆☆☆
De Benjamin Parent

Tom, un garçon renfermé, est proche de son grand frère Léo, plus décontracté, qui va tenter de le coacher pour son entrée au lycée. Le film est un peu plus noir que ce résumé le laisse supposer, mais ses ressorts profonds reposent sur un twist qu’il serait criminel de révéler. C’est cependant ce twist qui pose problème : dès qu’il est dévoilé (on le devine assez vite), le film perd aussitôt de sa nature inquiétante et ambiguë pour se transformer en chronique convenue de l’adolescence. Tom séduira-t-il la fille la plus sexy du lycée ? Évitera-t-il le harcèlement ? Parviendra-t-il à regagner l’estime de son viril de père ? Se débarrassera-t-il de l’emprise de son frère ? Un festival de portes ouvertes auquel Un vrai bonhomme nous invite sans trop se poser de questions.
Christophe Narbonne

L’AUTRE
★☆☆☆☆
De Charlotte Dauphin

Après avoir produit les deux derniers films de Mia Hansen-Løve (Maya et Bergman Island, qu’on découvrira courant 2020), la créatrice de bijoux Charlotte Dauphin franchit un nouveau cap en se lançant dans la réalisation. Son premier long métrage suit le parcours d’une jeune danseuse (l’énigmatique Astrid Bergès-Frisbey inexplicablement sous-employée par le cinéma français) qui a abandonné l’Opéra de Paris suite au décès brutal de son père. Elle vit de plus en plus en recluse, à l’exception d’une rencontre avec Paul (James Thiérrée), un photographe qui a pris la dernière photo de son père. Jouant sur les clairs-obscurs, la réalisatrice livre une variation finalement assez maladroite sur le temps du deuil ; et ambitieuse, certes, dans ses chassés-croisés dont on ne sait s’ils relèvent du réel ou de la réalité, mais manquant d’un véritable enjeu dramatique.
Sophie Benamon

LA SINCÉRITÉ
★☆☆☆☆
De Charles Guérin Surville

Voilà un film qui ambitionne de s’amuser avec les liens si particuliers unissant de façon éphémère les protagonistes d’un tournage de cinéma. Un film qui rappelle aussi et surtout combien le marivaudage nécessite une mécanique de précision complexe. On y suit un réalisateur qui, pour séduire une comédienne, se lance dans un film improvisé au cœur de la campagne française. Et, ô surprise, les sentiments vont au fil des jours prendre le pas sur les personnages, avec cette idée que la sincérité a besoin du prisme de la fiction pour se révéler. Mais tout reste ici au stade de la théorie pompeuse et excluante. Car, à force de jouer avec les clichés, ceux-ci se retournent contre cette Sincérité étouffant d’une maladroite... insincérité ! « L’artificialité » aurait été un meilleur titre. N’est pas Rohmer qui veut.
Thierry Cheze

MERVEILLES À MONTFERMEIL
☆☆☆☆☆
De Jeanne Balibar

Ah, la fantaisie de Jeanne Balibar ! Ce phrasé inimitable, cette folie douce dans le regard, cet art du contre-pied... On retrouve tout ça dans Merveilles à Montfermeil où elle campe une employée municipale chargée, avec d’autres, de mettre en place l’ambitieuse politique progressiste de la maire incarnée par Emmanuelle Béart : sieste pour tous, école internationale de langues (où tout le monde parle indifféremment français, arabe, espagnol, etc.), journées kilt et de la brioche... Dans ce bal des casse-pieds (nickelés), on croise Ramzy Bedia en homme à tout faire (et ex de Balibar) ou Mathieu Amalric en chargé de l’économie sociale et solidaire. Un vent de folie souffle qui emporte tout, l’intelligibilité du récit, la justesse des acteurs et notre patience.
Christophe Narbonne

 

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