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par Thierry Chèze
Toutes les critiques de Drive My Car
Les critiques de la Presse
Disons-le d'emblée, le nouveau film du réalisateur de Senses, Prix du scénario à Cannes, est une merveille. Un film d'un romanesque fou adapté d’une nouvelle de son Murakami avec pour personnage central Yūsuke, un metteur en scène de théâtre dont la spécialité est de monter des classiques en réunissant des comédiens de langues différentes. Le prologue de Drive my car (le générique ne surgit qu’au bout de 45 mn !) prend le temps d'installer les choses et notamment la relation de Yūsuke avec sa femme Oto, scénariste de télé, dont il découvre qu'elle le trompe sans qu'elle ne s’en aperçoive, avant qu’elle meurt soudainement sans qu'il n'ait pu mettre ce sujet sur la table.
Comment faire son deuil face à une situation ainsi restée en suspens pour toujours ? C'est ce que vont raconter les 2h15 qui suivent où Yūsuke part monter Tchekhov dans un festival avec sa Saab antique dans laquelle il a pour rituel d'écouter les enregistrements des dialogues de sa pièce à venir. Une lecture où... sa femme lui donnait la réplique. Chaque jour, il entend donc la voix de celle dont la disparition le rend inconsolable, conduit par une jeune femme mutique qui, au fil des des trajets, s'ouvre à lui. Drive my car va alors multiplier les personnages (un assistant coréen et sa femme sourde, l'amant de sa femme, star télé, qu'il a souhaité diriger…), prendre le temps de raconter l'histoire de chacun sans perdre de vue la colonne vertébrale du récit : ce long travail de deuil. Chaque mini- histoire mériterait un film en elle- même mais c'est la réunion de toutes qui crée la puissance jamais écrasante de cette fresque d'une délicatesse inouïe.