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À première vue, cette fable semi-tragique en temps de guerre a tout du mélo mignon (oui, c’est péjoratif) pour faire pleurer dans les chaumières. Pepper, un enfant de petite taille (ce qui lui vaut des moqueries et un harcèlement de la part du méchant de l’école), ne se remet pas de la mobilisation de son père. Nous sommes en pleine Seconde Guerre mondiale et les Américains d’origine japonaise sont haïs par la population. Ça tombe mal : il y en a un dans le village portuaire de Pepper, qui va se rapprocher de lui au risque d’amplifier son isolement. Victimes de la discrimination, unissez-vous ! Tel pourrait être le message simpliste de cette chronique de la haine ordinaire qui adopte heureusement le point de vue, naïf, de l’enfant. Cette approche typiquement spielbergienne, dénuée de cynisme, nécessite une mise à niveau du spectateur qui ne doit pas craindre la voix off sirupeuse, les bonnes intentions affichées et les quelques manquements du script–la taille de l’enfant n’est jamais réellement un enjeu fort. Car les qualités sont là : la description sentie de l’american way of life (drapeau, église, cookies), l’astucieuse réflexion sur le pouvoir de la croyance (et au-delà, de la fiction) enclenchée par un prêtre plus psychologue que dogmatique, la justesse des symboles dans les rapports taiseux entre le Japonais et l'enfant, le réalisme fantastique qui affleure... Une mélancolie têtue finit par infuser ce Little Boy, servi par un casting très homogène.