Eiffel
VVZ Production/Pathé Films

Qu'est-ce que le nouveau coronavirus a changé pour le tournage du très attendu Eiffel, avec Romain Duris ? Réponses avec sa productrice.

A l’heure des reprises des tournages nous avons interviewé Vanessa Van Zuylen (Un homme à la hauteur), la productrice d'Eiffel, le film de Martin Bourboulon avec Romain Duris, Emma Mackey et Pierre Deladonchamps, attendu en salles l’an prochain et dont le tournage fut interrompu précipitamment en mars dernier pour cause de Covid-19. Le film (qui n’est pas un biopic et raconte l’histoire d’amour derrière la construction de la tour) est sans doute l’un des évènement cinéma les plus attendus de l’an prochain, non seulement pour son sujet mais également de par son budget. Son tournage vient enfin de reprendre près de Paris avant de partir direction Bordeaux…

Vous avez donc repris le tournage d’Eiffel ?
Oui, on a repris jeudi matin, sous des trombes de pluie, mais ça s’est bien passé. A côté de la pandémie, franchement ce n’était pas bien grave (rires). Il nous reste à peu près trois semaines et demi de tournage.

Quand le tournage d’Eiffel s’est interrompu, il restait quoi à faire ?
En fait, on faisait une reprise de tournage. On avait déjà réalisé les deux tiers du tournage (prévu sur douze semaines), on s’était arrêté quelques mois pour des raisons de planning qui étaient prévues et on devait reprendre le lendemain du confinement. On était plus que prêts : c’était la fin de prépa, les camions devaient partir vers Bordeaux, les décors étaient finis…  En 24 heures, il a fallu défaire le travail de plusieurs semaines et nous occuper de la caméra que nous utilisons, qui est assez spéciale et devait revenir impérativement au labo pour des problèmes d’assurance… Cela a été très violent pour tout le monde. Mais l’équipe a été géniale.

Du coup, depuis combien de temps préparez-vous cette reprise ?
Ça nous a pris deux semaines de tout faire redémarrer, même si on avait un peu travaillé durant le confinement. La chance qu’on a eue, c’est de pouvoir garder l’intégralité des techniciens. Tous ceux qui étaient prévus en mars n’avaient pas d’autres engagements et étaient dispo : c’est exactement la même équipe.

Eiffel Tournage
VVZ Production/Pathé Films

La même, mais avec des masques…
Oui, on a mis un peu de temps avant de reprendre nos marques, mais rapidement on oublie. J’avais assez peur du protocole Covid qui est très contraignant : on arrive, on nous prend la température, on a des masques à changer toutes les 4 heures qu’on doit surveiller parce qu’ils changent de couleur, on se lave les mains toutes les heures, tout est désinfecté régulièrement, les costumes sont changés plus souvent qu’avant, la plupart des personnes en contact avec les acteurs portent des blouses, les caméras sont désinfectés avec des rayons ultraviolet, on a mis en place un code couleur par groupe de 50 personnes afin de limiter le nombre de personnes regroupées au même endroit avec une circulation spécifique sur le plateau pour chacun… J’avais très peur. Mais au final, ça s’est bien passé et surtout l’artistique n’est pas vraiment impacté par tout ça. Tout le monde est motivé et très bien organisé…

Il y a un protocole Covid spécifique au cinéma ?
Oui, le ministère du travail, via le CCHSCT cinéma, nous a envoyé des recommandations. Ensuite nous avons un référent médecin Covid qui a lu le scénario au regard de ce protocole et nous l’a adapté pour les scènes qui nous restaient à tourner. Bien évidemment, la tendance était plus à l’augmenter qu’à le réduire. Par exemple, nous avons testé toute l’équipe au préalable. Notre préoccupation première est bien évidement la sécurité de tous, mais aussi l’envie que tout le monde se sente rassuré sur le tournage.

Eiffel tournage 2
VVZ Production/Pathé Films

Ce protocole a-t-il impliqué des changements de scénario, de réalisation ou de plan de travail ?
En fait, pas vraiment. Nous avions déjà fait la majeure partie des grosses scènes de figuration à 500 personnes, comme l’inauguration de la tour Eiffel, du coup on a eu de la chance. Mais par exemple, cette semaine nous allons filmer une scène de repas. Au départ il devait y avoir une douzaine de convives… et bien du coup, on a réécrit pour que ce ne soit plus que 10 et au niveau de la réalisation, on va un peu plus écarter les acteurs pour respecter une certaine distance. Après la chance que nous avons, c’est que Eiffel est un film d’époque et à l’époque dans les tablées bourgeoises, avoir un mètre entre chaque couvert n’était pas choquant. Mais en gros, non on n’a pas changé le scénario. C’est vraiment juste une histoire d’ajustements pour respecter les recommandations. Parce que le protocole Covid, c’est surtout des recommandations qu’il faut adapter à chaque situation et à chaque tournage. Pour le plan de tournage, c’est vrai que tout est un peu ralenti et j’ai peur qu’on ait forcément des heures supp'. Mais en tant que productrice, j’espère qu’on fera le maximum pour pas ajouter des jours de tournage.

Du coup, la question que tout le monde se pose : pour les scènes de couple, de baisers… on fait comment ?
Pour ça, il faut confiner les acteurs qui vont avoir des scènes rapprochées, 14 jours avant le tournage. Pas ensemble évidemment (rires). Romain et Emma sont restés confinés deux semaines avant la reprise.  Et après, ils ont étés testés, comme l’ensemble de l’équipe. Mais encore une fois, nous avions eu de la chance, les principales scènes d’amour ont été tournées avant. En tout cas, ce protocole est rassurant pour tout le monde. On n’est pas en train de se demander toutes les 5 minutes si son partenaire a le Covid ou non, au moment où on retire le masque (les acteurs pas nous) pour jouer côte à côte.

Il y a forcément un impact économique ?
Bien sûr. Nous avons dû acheter des équipements spéciaux pour le protocole sanitaire, nous avons engagé une équipe médicale (médecin et infirmière sur le tournage), on a rajouté des gens à la régie, car il y a beaucoup de choses nouvelles à faire… Tout ça, a un coup pour le moment que je n’ai pas encore chiffré. Mais ce n’est pas négligeable.

Et pour ce qui est de l’arrêt de trois mois de tournage ?
Il faudra vraiment attendre la fin de la production pour pouvoir le chiffrer, mais pour l’instant nous sommes dans l’ordre de plusieurs centaines de milliers d’euros de coûts supplémentaires.  

Et aucune assurance n’a couvert cela ?
Non, les assurances ne couvrent pas les pandémies. En revanche, la reprise du tournage est, elle, assurée grâce au système mis en place récemment par le CNC. Si par malheur le tournage devait s’arrêter à cause de l’infection de quelqu’un, maintenant on est couvert…

Dernière question : la pandémie aura-t-elle un impact sur le calendrier du film ?
Je croise les doigts, mais en principe, non. Pour l’instant la date de sortie est maintenue au 17 février 2021. On a pris du retard, mais pendant le confinement, certaines personnes ont continué à travailler : les effets spéciaux, la musique, le montage… Donc ça devrait aller.

Eiffel tournage 3
VVZ Production/Pathé Films