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Un film politique n’est pas forcément une « gifle » ultra-réaliste ou une dissertation « nécessaire » sur un sujet d’actualité. Miguel Gomes le sait bien, qui fuit à toutes jambes ce brouhaha trop naturaliste à son goût, ou au contraire trop théorique (« l’abstraction me donne le vertige », dira-t-il lui-même dans une mise en abîme pleine d’auto-dérision), pour se réfugier dans le romanesque le plus baroque. Mais sans se boucher les oreilles pour autant : le réalisateur de Tabou a beau épouser ici la structure gigogne du célèbre conte oriental dans un rutilant écrin coloré (nuée de néons captées par le chef op’ de Apichatpong Weerasethakul), sa Shéhérazade n’affabule pas complètement. Au contraire, elle butine généreusement l’époque, le micro et le macro s’embrassent à l’écran tout comme la fiction et le documentaire, passant de faits divers cocasses relevés dans la petite ville de Resende (un coq jugé trop matinal au cœur d’un procès, les « flammes de jalousie » d’une amoureuse pyromane) à la crise économique en Europe (bouleversants témoignages de chômeurs, hilarante parabole sur l’austérité avec le Viagra comme possible « plan de redressement »). Parfois, le son se dérègle ou ne correspond plus à l’image. On voit par exemple un chantier naval menacé tandis que la voix-off s’alarme d’une invasion de guêpes, et inversement. Pourtant, pas de cacophonie : le cinéaste portugais est passé maître dans l’art de la correspondance baudelairienne. Ses associations d’idées poétiques et politiques font de ses inquiétudes un spectacle flamboyant.
Toutes les critiques de Les Mille Et Une Nuits, volume 1 : l'inquiet
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Oeuvre de contestation sociale et politique, "Les Mille et Une nuits" s’impose surtout par sa force poétique et lyrique sans précédent (...) De la pure poésie.
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La troïka merkelienne peut continuer de tout écraser, tant qu’il y aura des Miguel Gomes et des films comme ces "Mille et Une Nuits" (dont nous guettons les 2e et 3e volets avec une fébrilité encore plus aiguë), nous serons sauvés par la poésie, vengés par les forces de l’esprit. Et c’est ainsi aussi qu’un seul film suffit pour sauver tout le cinéma.
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L'enchantement est puissant. Comme le sultan Shahryar, nous voila pendu aux lèvres du conteur, impatient de connaître la suite.
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La beauté et la force politique du film tiennent dans cette manière qu’il a, d’un conte à l’autre, de glisser du cercle des décideurs(...) aux individus qui en sont les victimes.(...) Tout en ruptures de tons, de rythmes, de procédés narratifs, le film avance – en faisant de sa pauvreté une force insurrectionnelle – libre, enragé, et jouissif, comme un brûlot punk.
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Si les deux autres volumes de cette trilogie sont au moins au niveau de ce premier opus, il est à parier que l’on tient là un film-monde, qui recueille en lui toute l’âme d’un pays. Littéralement, un feux d’artifice.
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Un long et prodigieux voyage.
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L’Inquiet pose les bases d’un triptyque où le documentaire et la fable sont constamment mis en tension.
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Gomes s’empare d’une mythologie pour en créer une nouvelle, furieusement contemporaine, prouvant encore une fois quel grand cinéaste il est devenu.
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Drôle, émouvant, vif, surprenant, ce film adresse un savoureux pied de nez à tous les comptables qui nous gouvernent.
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Le premier volume de ce qui va finalement devenir une trilogie autour des "Mille et une nuits", entre réalité de la crise économique du Portugal d'aujourd'hui et fiction drôlatique sur la crise d'inspiration d'un cinéaste, avec doute, inquiétude et fuite burlesque à la clé.
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Cet "Inquiet" au ventre un peu mou révèle alors des bras forts et des jambes solides pour nous porter vers des contrées cinématographiques inconnues.
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Tout en gardant toujours un orteil dans la réalité sociale contemporaine (portugaise, certes, mais qui nous concerne tous), Gomes nous propulse dans les hauteurs de l’imaginaire et du cinéma, mettant le feu à notre tristesse dans un grand brasier joyeux.
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Présentée en trois parties, cette relecture contemporaine qui emboîte les récits les uns sur les autres, pose un regard lucide et ironique sur nos sociétés en crise. Impressionnant.
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Dans ce volume 1, quelques suppliciés de la crise se racontent en plan fixe. Présentés par le cinéaste comme "des magnifiques", ils le deviennent en effet, question de lumière, d'écoute, de délicatesse.
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Les registres ici changent (sous-titres, voix off, incrustations, scènes muettes, retour dans le passé, etc.) mais sans se confondre. C’est de cette hétérogénéité formelle que naissent le charme et la beauté du film.
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Ce film musarde, passe d'une tonalité à une autre, entrelace les intrigues à loisir, joue avec le spectateur, lequel se dit parfois que Gomes pousse le bouchon un peu loin, tout en reconnaissant qu'un film comme celui-là, non, il n'en a jamais vu.
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Le ton fantaisiste est parfois proche d’une fable absurde, et un peu absconse.(...) tout en nous parlant de doute, de difficulté à croire aux jolis contes à l’heure des mauvais comptes, ce premier volume construit déjà un univers assez foisonnant, et ouvre sur une prometteuse montée en puissance.
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Ne pas ânonner le réel mais sublimer la crise, telle est l’ambition folle que se donne le cinéaste portugais qui veut par stratégies obliques et formes hybrides redonner du lustre, de l’étoffe, une vibration à un quotidien qui, sinon, se dérobe dangereusement entre les commentaires économistes et la relégation muette.
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Trouver du sens semble souvent impossible. Et si l’on sort soulagé de la projection, on se prend à réaliser qu’hélas, tout ceci n’était pas qu’un conte…
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Le premier volume des "Mille et Une Nuits", "L'Inquiet", prétend mêler poésie et intervention sociale. Kitsch et poussif.