Première
par Christophe Narbonne
Comme il le dit lui-même, Alain Guiraudie pratique un "cinéma de la rêverie" dans lequel la mythologie se confond avec le réel, où les personnages, animés d’intentions floues, nouent des relations aussi concrètes qu’abstraites. Comme L’inconnu du Lac, Rester vertical débute sur une rencontre hasardeuse dans un endroit incongru : un homme sans but apparent, Léo, fait la connaissance d’une bergère, Marie, sur les hauts pâturages. Elle l’emmène chez son père qui a l’air d’un ogre. Ils baisent. Ils auront un enfant que Marie, lassée de ses hésitations, finira par abandonner à Léo. "Les femmes élèvent seules les enfants, y a pas de raisons que les hommes fassent pas pareil", lui dira-t-elle en guise d’explication.
Le Larrieu de l’Aveyron
Voilà pour l’intrigue de base dont Guiraudie, peu scrupuleux en matière de narration linéaire, s’écarte pour tirer le portrait d’hommes seuls confrontés à leur lâcheté, leur solitude et leurs frustrations. Il y a Jean-Louis, ce grand-père "monstrueux", obsédé par le loup tueur de moutons ; Marcel, un vieil homme taciturne, raciste et homophobe, qui héberge Yoan, un éphèbe qui s’occupe de lui, tout en le dépouillant. Et il y a donc ce Léo, un être en fuite qui refoule son homosexualité, repousse sans cesse au lendemain l’écriture du scénario qu’il doit à un producteur insistant et qui, enfin, essaie d’être père, bon gré mal gré. Le télescopage de tous ces personnages aboutit à des situations ambiguës, voire menaçantes, nimbées d’une lumière sépulcrale (la photo de Claire Mathon, déjà à l'oeuvre sur L'Inconnu du lac et Mon roi, est magnifique) qui confère au film ses allures de conte déviant -il y a même une sorte de fée guérisseuse et psy dans les bois. C’est tantôt très drôle, tantôt dramatique, parfois les deux en même temps. On pense au cinéma polisson et ludique des frères Larrieu, version aveyronnaise. Ca reste du pur Guiraudie, ça ne ressemble à rien de connu et c’est pour ça que c’est bien.
Première
par Christophe Narbonne
L’essentiel
Une nouvelle rêverie de l’auteur de L’Inconnu du lac
Léo rencontre Marie dans les hauts pâturages. Elle l’emmène chez son père qui a l’air d’un ogre. Ils baisent. Marie, lassée des hésitations de Léo, finira par abandonner leur enfant.
Alain Guiraudie pratique un « cinéma de la rêverie » dans lequel la mythologie se confond avec le réel, où les personnages, animés d’intentions floues, nouent des relations aussi concrètes qu’abstraites. Comme L’Inconnu du lac, Rester vertical débute sur une rencontre hasardeuse dans un endroit incongru dont l’aboutissement – une grossesse – procède moins d’un calcul que d’un caprice du destin. Chez Guiraudie, les personnages acceptent ce qui leur arrive sans trop se poser de questions. Il s’agit surtout des hommes que le cinéaste oppose aux femmes, plus terriennes : Jean-Louis, grand-père « monstrueux », obsédé par le loup tueur de moutons ; Marcel, vieil homme raciste et homophobe qui héberge Yoan, un éphèbe qui s’occupe de lui, tout en le dépouillant ; Léo, être en fuite qui refoule son homosexualité et repousse l’écriture d’un scénario, tout en essayant d’être père. Le télescopage de ces marginaux accouche de situations ambiguës, nimbées d’une lumière sépulcrale (la photo de Claire Mathon, déjà à l’œuvre sur L’Inconnu du lac et Mon roi, est magnifique) qui confère au film ses allures de conte déviant – il y a même une sorte de fée guérisseuse et psy dans les bois. C’est tantôt très drôle, tantôt dramatique, parfois les deux en même temps. C’est inattendu. C’est du Guiraudie.
Christophe Narbonne