Le réalisateur avait 86 ans et gagné deux fois l'Oscar du Meilleur réalisateur.
L'agence de presse tchèque CTK nous apprend aujourd'hui que le réalisateur Miloš Forman est décédé vendredi 13 avril, à l'âge de 86 ans.
Né en Tchécoslovaquie en 1932 d'un père juif et d'une mère protestante, tous deux morts en déportation, Miloš Forman a été formé en tant que scénariste à Prague et devient l'assistant d'Alfred Radok, un important homme de théâtre tchèque. Il réalise ses premiers films dès 1963 : L'As de pique, Les Amours d'une blonde… Après une satire féroce d son pays (Au feu les pompiers, 1967), il quitte la Tchécoslovaquie en 1968 après les événements du Printemps de Prague. Les Amours d'une blonde, nommé à l'Oscar du meilleur film étranger, l'ayant mis sur le radar hollywoodien et notamment de la Paramount, il tourne son premier film américain en 1971 : Taking Off ("le décollage", tout un programme), avec Jean-Claude Carrière au scénario, sur une adolescente en fugue et la déliquescence des valeurs américaines. En 1975, il tourne son premier énorme succès : Vol au-dessus d'un nid de coucou, avec Jack Nicholson enfermé dans un hôpital psychiatrique. Cinq Oscars (Meilleur acteur, Meilleur film, Meilleure actrice, Meilleur réalisateur et Meilleur scénario)... Vol au-dessus d'un nid de coucou reste avec le temps un chef-d'oeuvre des années 70 et du cinéma US en général, testament hippie (adapté d'un roman de Ken Kesey, grand gourou du mouvement hippie et apôtre du LSD) et traversée hallucinante du système psy américain rappelant les camps et les goulags d'Europe...
En 1979, Forman tourne la version cinéma de la comédie musicale Hair (encore un testament hippie) qui ne sera pas un grand succès, pas plus que son ambitieux film historique Ragtime tourné en 1981. En 1984, Forman retrouve son mojo avec Amadeus : triomphal biopic de Mozart qui rafle huit Oscars, quatre BAFTA et quatre Golden Globes. Un triomphe de cinéma total (musique, image, acting) puissant et critique qui dépeint Mozart comme le McEnroe de la partition. Par contre, son Valmont de 1989 (adaptation libre des Liaisons dangereuses où il retrouve Carrière au script) est un énorme échec. Son film suivant ne sortira qu'en 1996 : Larry Flynt, portrait du roi du porno US (Woody Harrelson), encore une esquisse de rebelle dans l'Amérique impériale. Forman est nommé à l'Oscar du Meilleur réalisateur pour ce film, mais il perd face à Anthony Minghella pour Le Patient anglais. Trois ans plus tard sort son ultime classique : Man on the Moon, ou l'histoire du comique américain Andy Kaufman, incarné par un Jim Carrey hallucinant, totalement possédé par l'esprit de son personnage (un récent documentaire sur Netflix, Jim & Andy : The Great Beyond montre les coulisses dingo du film). Man on the Moon est un chef-d'oeuvre instantané qui précipite toutes les obsessions formaniennes (solitude du rebelle/artiste/poète dans un monde figé). Après cela, Forman ne tournera qu'un seul film : Les Fantômes de Goya en 2006 avec Stellan Skarsgård dans le rôle du peintre et Carrière au scénario. L'art face au système, le peintre versus l'Inquisition. Toujours les mêmes obsessions, jusqu'au bout. Les mêmes fantômes, qui ont fait le voyage d'Europe en Amérique.
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