-
Sur une période de cinq ans, Mohamed Siam a filmé le parcours d’Amal, jeune fille révoltée, maltraitée par la police, au Caire, Place Tahrir, en 2011 alors qu’elle n’avait que 14 ans. “J’ai les cheveux courts parce que les police me les a arrachés”, dit-elle à son petit ami qui s’émeut de sa masculinité affichée. Siam recourt à un montage elliptique et fragmentaire qui rend à la fois compte de l’état émotionnel d’Amal et d’un pays en proie au chaos depuis la révolution égyptienne. Amal a en effet fait sienne les convulsions et les contradictions de ce grand pays arabe en pleine crise identitaire face aux aspirations démocratiques de ses citoyens. Habillée en garçon pendant son adolescence pour pouvoir manifester sans être inquiétée, la jeune fille joue alors au mec, parle fort, invective. “Tu es un voyou !” crie-t-elle au visage d’un policier, interdit, avant de s’embrouiller avec sa mère qui a longtemps soutenu Moubarak. En filigrane, Siam glisse des extraits de vidéos de famille montrant Amal enfant, filmée avec amour par son père, mort dans l’intervalle. Le fantôme de ce père chéri hante ce documentaire rageur et poignant à la fois, qui s’achève à la majorité d’Amal, à l’heure des choix -pour le moins surprenants. Puissant.