Première
par Frédéric Foubert
Le tueur à gages et le garde du corps. Samuel L. Jackson et Ryan Reynolds. Nick Fury et Deadpool. Tout est dans le titre, et sur l’affiche… Il ne faudra pas vous plaindre à la sortie si vous trouvez que Hitman & Bodyguard a un air de déjà vu : tous les voyants clignotent pour vous faire comprendre que vous vous apprêtez à voir le film le plus générique du monde. Entertainment Weekly a intitulé sa critique “Hitman & Bodyguard est un film d’avion correct (an OK airplane movie)”, ce qui est sans doute la façon la plus limpide de résumer l’affaire. Pourtant, bizarrement, malgré toutes les précautions prises par le marketing et le “concept” du film, celui-ci a besoin d’une énorme demi-heure d’exposition avant de réellement se mettre en jambes. Ryan Reynolds joue un ancien bodyguard déchu, toujours amoureux de son ex (Elodie Yung, l’Elektra de la maison Marvel/Netflix, parfaite, comme d’hab’), qui doit escorter un tueur à gages à travers l’Europe, jusqu’à La Haye, afin de confondre un affreux criminel de guerre (Gary Oldman, de passage). Une fois ces enjeux alambiqués posés, le buddy-road-movie peut se déployer, de Londres à Amsterdam. Courses-poursuites, explosions, blagounettes, Ryan Reynolds en clown triste à la mine constipée, petits apartés sur Salma Hayek en bomba latina ordurière… Patrick Hughes (Expendables 3) suit à la lettre les consignes du GPS, sans jamais dévier, à part dans une scène de combat interminable et rigolote (rigolote car interminable) dans l’arrière-boutique d’un magasin de bricolage d’Amsterdam. Mais bon, dit comme ça, vous comprenez que c’est peu.
Le film est néanmoins régulièrement dynamité de l’intérieur par l’abattage pétaradant et la badasserie éternelle de Samuel L. Jackson, manifestement ravi d’être là et de retrouver un rôle de tueur à gages “avec une morale”, sa spécialité depuis Pulp Fiction. Les deux récents westerns de Tarantino mis à part, on n’avait en tout cas pas vu l’acteur aussi impliqué depuis longtemps, riant à gorge déployée, flinguant le reste du cast du regard, allumant des brasiers soul de sa voix de velours, battant sans doute ici son record perso de “motherfucker” à la minute. Même son personnage a un patronyme plus cool que les autres (Darius Kincaid). “I’m just doing my thing !” dit-il à un moment. Peut-être, oui. Mais quand Sam Jackson fait “son truc”, on rigole enfin. Un peu. Moralité ? Pour les plus affamés, voici de quoi patienter jusqu’à Kingsman 2.