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La dépression post-partum, bien connue des psys, demeure taboue dans nos sociétés où tout est fait pour mettre les parents – et les mères en particulier – dans les meilleures dispositions possibles pour accueillir leur enfant. À l’occasion de son deuxième long métrage, Emily Atef évite admirablement les pièges du film à thèse en se concentrant sur la mère et sur son parcours du combattant pour « apprendre » à accepter sa maladie, à la dominer et, enfin, à chérir son enfant. Atef n’oublie pas pour autant le père, personnage-clé dans la guérison de sa femme, partagé entre son amour pour elle, son souci de préserver le bébé et celui de ménager la susceptibilité de sa famille, qui s’est substituée à la mère défaillante. Au coeur de ce film, austère et appliqué en apparence, se cache une foi immense dans l’homme et sa capacité à se transcender.
Toutes les critiques de L'Étranger en moi
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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On vit ce film dans la tête de cette femme désaimée par son mari, dans un sentiment d'oppression qui pourra repousser certains spectateurs. Mais la pertinence du regard de la réalisatrice sur son héroïne, qu'elle ne juge jamais, et la maîtrise de sa mise en scène emportent l'adhésion.
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Pour son deuxième long, la cinéaste allemande Emily Atef aborde de front un sujet tabou en montrant que l'instinct maternel n'est pas inné. Il est long le chemin de son personnage, incarné par une remarquable Susanne Wolff, pour devenir une mère aimante et attentionnée.
Ce beau film découvert à la Semaine de la critique en 2008 met aussi l'accent sur la famille de cette femme incomprise par les siens et soutenue par un compagnon solide, mais un brin dépassé. Le pathos est totalement exclu de cette chronique passionnante et déculpabilisante. Atef ose poser sur la table un problème dont on parle trop peu sans essayer de donner des leçons. Le malaise qui prend le spectateur aux tripes devant l'impuissance d'une maman presque ordinaire invite à une réflexion sur la pression sociale qu'engendre la maternité. -
L’étranger en moi aborde la dépression post-partum avec sensibilité, sans complaisance ni misérabilisme. Une réussite.
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Ce sujet de film-dossier, la cinéaste le traite à la manière de la nouvelle vague allemande : registre intimiste, style sobre et épuré, peu de dialogues. On est à la lisière du fantastique : plus rien ne paraît aller de soi, ni la tendre extase de la tante au-dessus du berceau, ni l'aisance du mari à s'organiser pour le confort de sa famille. D'abord perplexe face au comportement de la jeune femme, l'entourage devient méfiant, puis carrément hostile. Voir cette scène terrible où Rebecca se retrouve obligée de justifier son identité pour récupérer son bébé... oublié à un arrêt de bus.
Actrice de théâtre, Susanne Wolff habite intensément ce personnage à la dérive : à fleur de nerfs et de peau, elle passe, en un geste, de la vulnérabilité à la violence. La dépression post-partum peut toucher toutes les femmes - Emily Atef tient à faire passer le message -, mais pour peu qu'on la soigne, on en guérit. La plus belle scène du film se déroule d'ailleurs chez une thérapeute : celle-ci masse la mère qui reproduit sur son bébé les mouvements dont elle est train de ressentir la douceur.
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(...) le mise en scène d'Emily Atef est assez élégante et fluide et le point de vue pertinent pour que la dramaturgie et les personnages priment sur le reste.
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Emily Atef filme sans dramatisation superflue les affres d’une mère incapable d’éprouver de l’affection pour l’enfant qu’elle vient de mettre au monde et signe un troublant portrait de femme en détresse.
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Car c'est immédiatement cela qui fait le prix de L'Etranger en moi : une manière de provoquer un malaise chez un spectateur confronté à ce qu'il est facile de considérer comme une situation dépassant l'entendement.
Mais le mérite du film d'Emily Atef ne consiste pas seulement dans la description juste d'une situation de détresse pathologique. Avec une dureté que souligne l'apparente simplicité de ses choix de mise en scène, le film détaille, froidement, la manière dont la famille, et plus largement la société, tentent de se protéger, rudement, contre ce qui les dépasse.
Faut-il souligner dès lors que L'Etranger en moi repose sur l'interprétation de son actrice principale, Suzanne Wolff, dont le mutisme buté, douloureux et inquiétant semble exprimer avec une justesse étonnante, une détresse que la mise en scène tente de scruter avec attention ?
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Le dérèglement, un peu trop sage, en reste souvent au stade de l'idée théorique, et la mise en scène en demi-teinte est parfois timorée, parfois élégante. Pourtant le film s'accorde mieux dans son dernier tiers, quand il s'agit pour l'héroïne, de remonter la pente et d'entrer dans une vraie attention aux gestes qui trouve la bonne distance entre état psychique et filmage behavioriste.