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De prime abord, le climat installé par la réalisatrice intrigue : serait-on en pleine histoire de fantômes, dans une sorte de remake oriental des Autres ? Évidemment, non. Les spectres des Secrets sont ceux d’une société arabe traditionaliste qui est confrontée à la modernité. Plus ce gynécée cloîtré se mue en choeur antique exprimant le refoulé et les frustrations, plus Les Secrets devient théâtral. Dans la dernière partie, où les deux mondes se font face, Amari retrouve enfin, en zone neutre, les nuances de Satin rouge, posant de passionnantes questions sur deux visions de la condition féminine chez les musulmans. Les réponses – terribles – sont alors bien plus signifiantes que l’atmosphère de fable allégorique du début.
Toutes les critiques de Les secrets
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Inquiétant huis-clos, lourdes révélations, la folie n'est jamais loin, l'ombre du drame plane. Inquiétant et intemporel.
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Les secrets révèle des rapports dominants-dominés, d’autant plus injustes que la plus jeune n’a jamais rien connu d’autre que ce carcan obscur. Mais, instinctivement, elle perçoit qu’il existe un autre univers que celui, claustrophobe, dans lequel elle est enfermée. Si les hommes sont haïs dans son milieu, la féminité est, quant à elle, niée. La jeunesse et l’impétuosité de l’adolescente deviennent le vecteur du désir et de l’ouverture au monde. Raja Amari réalise ainsi une œuvre féminine mais pas féministe, un cri libératoire envoutant.
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Le résultat distille une rage aiguë, mise en scène avec un sens de la composition qui transforme l'espace en écrin fantasmatique, dédié à la joliesse comme à la monstruosité.
Ce huis clos féminin s'y révèle alors pour ce qu'il est : le témoignage d'un enfermement social et d'une aliénation d'une violence d'autant plus inouïe qu'elle est intériorisée et reproduite par ses victimes. C'est une ferme et courageuse prise de position à l'égard d'un débat redevenu contemporain. -
Dans Satin rouge, son premier film prometteur, la réalisatrice racontait l'impossibilité de s'épanouir en tant que femme en Tunisie. Ici, elle radicalise sa mise en scène et son propos. Un charme inquiétant, à la lisière du fantastique, émane du huis clos et des décors, les intérieurs venteux et décrépis contrastant avec la douceur lumineuse de la campagne. La claustration des personnages, prisonniers du lieu autant que de leur mode de vie, renforce le malaise.
L'opposition entre les jeunes arrivants, aux moeurs libérales, et les deux soeurs, victimes d'une éducation archaïque, est certes un peu appuyée. Mais la cinéaste affronte avec audace quelques tabous, notamment la frustration sexuelle. Voir cette scène très crue où la soeur aînée, enfermée dans la salle de bains comme une adolescente, se masturbe. Et le rebondissement final, d'autant plus terrifiant que sobrement filmé, résume le propos de la cinéaste : le refoulement ne peut mener qu'à la violence.