Barbet Schroeder conclut une passionnante réflexion sur les différentes représentations du mal.
1974. Avec Général Idi Amin Dada : Autoportrait, Barbet Schroeder fait basculer son cinéma baba cool (More, La Vallée) dans l’âge adulte. À partir de ce film d’exception, il n’aura que de cesse d’explorer les ténèbres de l’âme humaine à travers des documentaires et des fictions. Avec Le vénérable W., il clôt de la plus belle manière sa « Trilogie du Mal », entamée avec Général Idi Amin Dada… et poursuivie avec L’Avocat de la terreur -portrait de l’ambigu Jacques Vergès. Dans ce nouveau documentaire tourné dans des conditions difficiles et dangereuses, il s’intéresse à la figure controversée d’Ashin Wirathu, moine bouddhiste qui professe l’épuration ethnique envers la population musulmane minoritaire de Birmanie. Ses prêches, d’une violence rare, sont à l’origine de crimes contre l’humanité que les instances internationales ne parviennent toujours pas à endiguer.
Journal de l’horreur
Comme dans Général Idi Amin Dada…, Schroeder nous confronte à un personnage de « monstre sympathique » qui déroule avec le sourire son discours de haine devant une caméra neutre et les questions faussement naïves de l’intervieweur. La méthode a fait ses preuves : en instaurant un climat de confiance avec son interlocuteur, le réalisateur suisse obtient des confidences effrayantes de banalité qui légitiment l’horreur. Il entrecoupe les propos d’images, parfois insoutenables, de massacres filmés avec les moyens du bord, smartphones, caméras de télévisions, et autres. Ce patchwork visuel est parfois brouillon mais confirme le chaos à l’œuvre dans cette région du monde laissée aux mains de gourous haineux, de politiciens dépassés (dont l’ex-prix Nobel, Aung San Suu Kyi) et de militaires sanguinaires.
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