Le premier Dragons avait été un tournant de l’animation. Pionnier du renouveau de la 3D, irrésistible conte initiatique sur l’apprivoisement et la découverte du monde, le film de Chris Sanders et Dean DeBlois, porté par un vrai frisson libérateur, tout en éruptions et en séquences de vol furieuses, avait fait comprendre que le studio créateur de Shrek pouvait s’envoler à des hauteurs de grâce que l’on pensait alors réservées à Pixar. Une surprise d’autant plus folle que le projet avait connu une douloureuse histoire de production et avait bien failli se transformer en accident industriel. La suite, forcément, était attendue et redoutée. Sans son comparse Sanders, DeBlois pourrait-il égaler le premier opus ? Dans un contexte de financement plus confortable, réussirait-il à retrouver les sommets de poésie de l’original ? La réponse est oui ! En termes d’émotion et de spectacle, dès les premières minutes, Dragons 2 s’annonce comme une pure merveille. Avec une évidente suprématie visuelle, puisque l’on passe d’embardées miyazakiennes (l’apparition de la mère qui sort des nuages, moment extraordinaire) à l’épopée viking digne d’un Richard Fleischer ou à des séquences d’humour faramineuses... Prenant pour prétexte les retrouvailles entre Harold et sa génitrice, absente depuis vingt ans, cet opus révèle une aptitude folle pour l’aventure. Idéalement rythmé et écrit, il embrasse à chaque plan le gigantisme visuel d’un monde où se croisent léviathans, dragons et guerriers furieux. Mais, comme si cela n’était pas déjà suffisant, la prouesse de DeBlois est ailleurs, dans son aptitude à insuffler un mélo freudien au coeur de cet univers sauvage. Dragons 2, c’est un peu Hamlet caché sous Le 13e Guerrier. Un rêve de cinéma grand public, généreux, pudique et émouvant, qui s’attaque à des thèmes comme l’héritage, le passage à l’âge adulte et la transmission. Dans le parcours de ce gamin qui devient roi et qui doit assumer ses responsabilités, il n’est pas interdit de voir la fin d’une ère – celle de Jeffrey Katzenberg, le patron de DreamWorks, qui a décidé de prendre un peu de champ – et, pour le studio, l’ouverture de l’acte II vers de nouveaux horizons fantasmatiques.