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Si le cinéaste complique pour le plaisir, il questionne au passage la morale, l'intime et la justice. Ce n'est pas donné à tout le monde. Dans une version adulte du Petit Criminel, Thomassin l'aide beaucoup.
Toutes les critiques de Le Premier Venu
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Ellepar Anne Diatkine
Le film fait éclater les étiquettes: les personnages existent avant d'être catalogués SDF, voyou ou flic. Cette liberté est reposante. Comme souvent chez Doillon, il s'agit de filmer le lien entre la parole et le mouvement. Entre le regard de Jacques Doillon, cinéaste en marge après avoir longtemps été encensé, et les "premiers venus" qu'il filme; la compréhension est totale et sans pitié. Dommage que la dernière partie du film patine.
- Paris Matchpar Alain Spira
Cette comédie dramatique insolite est sans doute un des meilleurs films de Jacques Doillon. Une fois de plus, il nous raconte une histoire déjantée, mais crédible, et créé un climat qui n'appartient qu'à lui. Directeur d'acteurs hors pair, il permet à Gérald Thomassin de crever l'écran avec puissance.
- Télé 7 jourspar Viviane PESCHEUX
Sept ans après Carrément à l'ouest, Doillon le cinéaste est enfin de retour! Des instants de grâce, il y en a beaucoup dans ce chassé-croisé sentimental où prime sa façon unique de s'attarder sur les visages et corps de ses acteurs. Et dans sa nouvelle donne du désir, de la violence et du hasard, se détache la belle rugosité de jeu de Gérald Thomassin, son oubliable Petit criminel.
- Le JDDpar Jean-Luc Bertet
Jacques Doillon dirige avec une stupéfiante finesse ces deux improbables personnages. Il obtient de Clémentine Beaugrand et Gérald Thomassin des moments d'une grande vérité. Mais surtout, il esquisse un beau portrait de femme.
- Fluctuat
Le premier venu, ou l'histoire d'un amour sans retenue et sans fard d'une adolescente bourgeoise pour un malfrat solitaire, signe le grand retour de Jacques Doillon après cinq ans de silence.
- Exprimez-vous sur le forum cinémaCamille s'est attachée à Costa. Ce premier homme qu'elle s'est choisie, qui l'a prise là-bas dans la ville laissée derrière eux, elle a décidé qu'il ne serait pas qu'une figure passante dans un bar d'un soir, que ce ne serait pas "n'importe qui". Elle s'attelle donc à le poursuivre pour le trouver, le connaître et l'aimer, construire une relation, farouchement puisqu'elle a la force de sa première fois. Le suivant comme une petit Antigone qui réclamerait son Droit, elle erre dans Abbeville, sur le territoire du jeune homme, où il est bien connu pour ses larcins et ses bêtises. Car avec sa gueule et sa gouaille de sauvageon, Costa, mauvais fils et père absent ne payant pas sa pension alimentaire, est davantage un garçon qu'on fuit qu'un garçon qu'on aime. C'est même "un cas tragique" dira-t-on de lui. Mais Camille, face à la nature brute de Costa, trace sa route jusqu'à la mer et au-delà : déterminée même si lui ne se laissera pas si facilement attendrir ni changer. Habitué à n'être pas regardé, il semble avoir résolument choisi de ne pas grandir, plongé dans sa bulle. Animé par cette peur de perdre ce à quoi il s'attacherait, il est devenu brute solitaire et je-m'en-foutiste, âcre.L'amour à pleine boucheJacques Doillon magnifie l'âpreté de ces deux personnages en les plongeant dans le vif des éléments. Il les filme dans le vent, sur les grandes plages froides du nord, près des rochers et des falaises, dans une lumière intense, presque aveuglante. Ainsi la nature qui les entoure est magnifiée dans toute sa radicalité : tout à la fois chaude et froide. La peau des acteurs, diaphane, demande presque à être touchée, réchauffée, modelée, afin que les personnages sachent comment exister, naissent dans leur âge adulte. Ce geste cinématographique d'une rare précision touche tout particulièrement tant la forme suit le fond, l'épouse parfaitement.
Face à face, Camille et Costa se heurtent au monde et s'apprivoisent. Face à eux Cyril, un flic du coin à qui échappe tout ce qui ne rentre pas dans les cases définies et Gwendoline, la femme de Costa, mère de sa fille, terrienne inébranlable et logique : adulte. Entre ces deux pôles, ils grandiront. Adolescente issue d'une bourgeoisie suffisamment aisée pour qu'elle ne se soit jamais posé aucune question d'argent, Camille poussera avec tous les gestes extrêmes de son âge, cherchant comment payer tous les prix de sa défloraison. Comme si elle ne pouvait assumer ce statut qu'en payant de sa personne. Aussi poursuit-elle ce qu'elle croit être son destin, inébranlable. Elle parle d'amour à pleine bouche, ne voulant surtout pas s'en méfier, fuyant la compassion et interrogeant l'offense, celle qui viendrait du corps. Costa, lui apprendra à être pris et puis laissé, dépendant et moteur.Jacques Doillon qui a mis cinq ans pour réaliser ce long métrage, le voit sortir le même jour que Disco, la semaine où Bienvenue chez les Ch'tis dépassera sans doute en termes d'entrées La grande vadrouille. A nous aujourd'hui de soutenir ce geste cinématographique tant sa belle proposition enrichit le regard et l'apaise, tant il est touchant de constater qu'il est encore possible de voir et de faire des films aussi sincères et justes. Le Premier venu
De Jacques Doillon
Avec Clémentine Beaugrand, Gérald Thomassin, Guillaume Saurrel
Sortie en salles le 2 avril 2008
Illus. © Pyramide Distribution
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