Toutes les critiques de Il divo

Les critiques de Première

  1. Première
    par Gael Golhen

    Il aura donc fallu attendre l’avant-dernier jour pour se prendre ça dans la gueule. Une claque qui nous réconcilie avec le cinéma (c’en est), avec le festival (depuis le début Frémeaux soutient Sorrentino contre vents, marées et 99% de la presse française - MERCI), avec le monde (standing ovation à la fin). Ça ? Un film monstre, une expérience sensorielle (1h50 dans la tête d’un mec et au cœur de la matrice Italienne), un clip colossal qui emporte tout sur son passage. En trente secondes (générique Hitchocko/Fincherien), on sait qu’on tient un truc immense. En gros, « Il Divo » tente de percer le mystère Giulio Andreotti, l’homme le plus complexe et le plus ambigu d'Italie qui, depuis cinquante piges, est au cœur de la scène politique. Normalement, à ce moment-là, on devrait vous causer des dérives de la politique italienne, des collusions entre mafia et politique, des Brigades rouges, de Berlusconi… Mais non. « Il Divo », n’a rien à voir avec « le Promeneur du Champs de Mars » ou « le Caïman ». Rien à foutre du cinoche engagé, un peu fruste esthétiquement. Comme son précédent long, c’est d’abord un trip néo-publicitaire gaulé comme du Fincher. Sauf qu’à cette énergie visuelle, Sorrentino rajoute la rage et le regard de Petri (Elio). N’attendez donc pas un biopic procédural, mais plutôt quelque chose comme « Il était une fois en Italie », souffle romanesque à échelle humaine, style au premier plan et dérive mentale en prime. Un « Fight Club » italien (encore une fois le style, la société et la psychose) qui brouille les pistes à tout moment. Un film monstre qui navigue entre bouffonnerie et compassion ; entre le cynisme de la vision et la naïveté des personnages. Son récit progresse au gré des pulsions, des rêves, des personnages et des massacres. Normal : en bon Italien, Sorrentino fait du cinéma opératique, sentimental, mais vernis d’une modernité flamboyante. Voilà le sujet profond de « Il Divo », la confrontation entre deux idées du cinéma à travers l’opposition entre un personnage de politique monstrueux (fabuleux Tonino) et un environnement de chromos photographiques somptueux. La réactivation d’une tradition du film politique italien sixties (qui mêlait regard social, mélancolie, tendresse et férocité), en la nourrissant d’une frime technique ahurissante. En bref ? Un chef d'oeuvre.

  2. Première
    par Stéphanie Lamôme

    En quelques détails toujours extrêmement frappants (cette façon de serrer la main ou de se déplacer telle une blatte), Sorrentino nous dresse le portrait d’un vrai personnage de fiction, grotesque, bossu, migraineux et insomniaque, qui glace d’autant plus les sangs qu’il est filmé minuscule et ratatiné dans un cadre trop grand et que son pouvoir, poli et humble, chuchotant et immobile, ne montre aucun signe extérieur de puissance. Présenté en compétition officielle à Cannes, Il Divo, dénonciation des rapports incestueux entre le pouvoir officiel, la mafia, les loges maçonniques et le Vatican, regarde Gomorra (l’autre Italien de la compète) en miroir, tous deux s’attachant à stigmatiser les dysfonctionnements d’une Italie qui crève de sa corruption. Réactivant le cinéma engagé transalpin, le réalisateur, à l’opposé
    d’un Nanni Moretti avec son Caïman, lui offre un sacré lifting en préférant la farce baroque menant grand train au didactisme rébarbatif. Grâce à une mise en scène clinquante, tapageuse et incroyablement inventive qui défie l’espace et le mauvais goût (dans lequel il se vautre parfois avec délectation, comme dans cette scène où le clan Andreotti débarque dans la cour du palais, entre western moderne et clip
    à la Puff Daddy), Sorrentino dépoussière la politique à coup de Kärscher. Certains appellent ça de la frime ; nous, du génie.

Les critiques de la Presse

  1. Elle
    par Françoise Delbecq

    Des dialogues percutants et teintés d'humour, soutenus par une musique classique et techno, confèrent à ce nouveau genre de film politique, une efficacité redoutable.

  2. Fluctuat

    Paolo Sorrentino dynamite le système politique italien en livrant un portrait haut en couleurs de Giulio Andreotti. Prix du Jury au dernier Festival de Cannes, Il Divo pourrait bien inspirer certains cinéastes hexagonaux.Giulio Andreotti valait bien un film. 25 fois ministre et 7 fois Président du Conseil, l'homme a régné pendant plusieurs décennies sur la vie politique italienne, avant d'être soupçonné d'entretenir des liens étroits avec la Mafia. Pourtant, celui que l'on surnomme «l'Inoxydable» continue d'exercer des fonctions officielles, à bientôt 90 ans.Pour dresser le portrait de cet assoiffé de pouvoir, Paolo Sorrentino choisit l'option du cartoon survolté et ultra stylisé, mêlant rock et musique classique, audaces visuelles et réparties cinglantes, faits avérés et séquences fantasmées... Shooté à la farce ironique, Il Divo vient creuser sous le masque impassible d'Andreotti, mais va bien plus loin que le simple portrait à charge. Si le thème de la corruption se présente d'emblée comme l'enveloppe du film, il fait avant tout office de décor d'un théâtre absurde. Evitant la dramatisation outrancière, Sorrentino transforme les relations qui unissent Gouvernement, Vatican et Mafia en purs motifs d'un cinéma jouissif et décomplexé (les clins d'oeil à Sergio Leone).Entre une ébouriffante scène de fête où le ministre du Budget se trémousse grotesquement et les sanglants assassinats qui émaillent le trajet de l'Italie, l'agitation de la mise en scène en revient toujours à la figure d'Andreotti (incarné par le magistral Toni Servillo), loup solitaire qui rase les murs de Rome au coeur de la nuit. Distrait par la pittoresque galerie de caractères qui entoure le personnage, le spectateur ne saurait déterminer si notre héros est le responsable ou la victime de l'état fiévreux du système politique transalpin.Il Divo se focalise entièrement sur Giulio Andreotti, mais dessine en creux un tragique portrait du peuple italien. Ce sont bien les souffrances d'un pays tout entier qui traversent la silhouette impériale et difforme du personnage. Dépoussiérant avec autorité les mécanismes du pouvoir, Paolo Sorrentino dépasse la seule spécificité italienne pour offrir un tableau d'une pétrifiante universalité. Il DivoDe Paolo SorrentinoAvec Toni Servillo, Anna Bonauito, Giulio BosettiSortie en salles le 31 décembre 2008[mediabox  id_media="11560" align="null" width="500" height="333"][/mediabox] Illus. © StudioCanal - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire le fil biopic sur le blog cinéma- A lire : l'histoire du cinéma italien

  3. Paris Match
    par Alain Spira

    La mise en scène de Paolo Sorrentino boostée par une chorégraphie rock'n'roll, nous tague ce "pape noir" de la démocratie chrétienne en un droopy flegmatique et cynique, remarquablement incarné par Toni Servillo.

  4. Le JDD
    par Patrice Trapier

    Pour raconter les arcanes de son pays, les liens occultes Vatican-DC-Mafia, Sorrentino a composé un opéra baroque, brillant et macabre, qui s'attache moins à la compréhension historique de son sujet qu'à une évocation esthétique et psychologique de l'exercice du pouvoir.