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Première
par Gérard Delorme
On pourrait ricaner de ce Blue Velvet situé à Marseille, mais ce serait de la pure mauvaise foi. Il n’y a rien de mal à emprunter aux meilleurs, à condition d’y apporter sa patte, comme De Palma l’avait fait en vampirisant Hitchcock. L’essentiel est le résultat – ici, une fiction située dans un contexte français, moderne et crédible. Aux antiques perversions (prostitution, SM, drogues) se sont substituées de nouvelles (le suicide collectif par le biais des sites sociaux virtuels). Gilles Marchand les met en scène avec une clarté et une lisibilité qui se manifestent
aussi bien dans les prises de vues réelles que dans les images de synthèse représentant le jeu vidéo. L’atmosphère de mystère et de danger est renforcée par une musique et des effets sonores très soignés, une fois encore empruntés à Lynch mais qui ne versent jamais dans la copie servile. Au final, L’Autre Monde ne fait que traduire, de façon élégante et sexy, une thématique vieille comme le monde (Éros et Thanatos).
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Première
par Emilie Lefort
On aurait aimé (...ou pas) passé dans cet autre monde que nous propose Gilles Marchand. Malheureusement, en dehors d'1h40 d'ennui mortel, le film ne trouve aucune grâce à nos yeux. Un scénario plat avec des dialogues sortant tout droit d'un mauvais soap. Le tout joué par des acteurs qui sont à la hauteur de ce qu'on leur demande de jouer... c'est à dire dans un surjeu assez insupportable. L'Autre Monde, qui raconte l'histoire de Gaspard devenant obsédé par une fille suicidaire adepte du jeu en réseau Black Hole, mêle monde réel et univers virtuel. Un aspect déjà vu et revu en beaucoup mieux. En bref, L'Autre Monde ne nécessite vraiment aucune exploration de votre part. Passez votre chemin sauf si vous êtes insomniaque et à la recherche d'un bon somnifère.
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À défaut de révélations fracassantes sur les moeurs de nos jeunes, L’Autre Monde balance sur son auteur. Sa flagrante méconnaissance de la culture teenage d’aujourd’hui le pousse à en faire une caricature de romantisme sombre qui ferait ricaner les derniers gothiques encore en activité. Les bouleversements identitaires, l’incompréhension des premiers désirs ou des pulsions sexuelles se résument à un peu de touche-pipi et à une puérile d’une mystérieuse femme fatale peroxydée et son avatar. Pire, L’Autre Monde ne joue jamais sur la contamination de la réalité par le virtuel, Marchand s’échinant à dresser des barrières toujours plus importantes entre les deux (le jour, le soleil et les couleurs pour l’un ; la nuit, l’obscurité et la monochromie pour l’autre). Quand il n’ignore pas l’élément-clé des jeux vidéo actuels : le principe d’immersion du joueur. Si l’artificialité des situations et des personnages laisse le spectateur à distance au lieu de l’impliquer, le réalisateur, lui, est englouti par ses influences : Hitchcock, Kubrick mais surtout Lynch, avec d’encombrantes régurgitations de Mulholland Drive et Blue Velvet.