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On pourrait ricaner de ce Blue Velvet situé à Marseille, mais ce serait de la pure mauvaise foi. Il n’y a rien de mal à emprunter aux meilleurs, à condition d’y apporter sa patte, comme De Palma l’avait fait en vampirisant Hitchcock. L’essentiel est le résultat – ici, une fiction située dans un contexte français, moderne et crédible. Aux antiques perversions (prostitution, SM, drogues) se sont substituées de nouvelles (le suicide collectif par le biais des sites sociaux virtuels). Gilles Marchand les met en scène avec une clarté et une lisibilité qui se manifestent
aussi bien dans les prises de vues réelles que dans les images de synthèse représentant le jeu vidéo. L’atmosphère de mystère et de danger est renforcée par une musique et des effets sonores très soignés, une fois encore empruntés à Lynch mais qui ne versent jamais dans la copie servile. Au final, L’Autre Monde ne fait que traduire, de façon élégante et sexy, une thématique vieille comme le monde (Éros et Thanatos). -
On aurait aimé (...ou pas) passé dans cet autre monde que nous propose Gilles Marchand. Malheureusement, en dehors d'1h40 d'ennui mortel, le film ne trouve aucune grâce à nos yeux. Un scénario plat avec des dialogues sortant tout droit d'un mauvais soap. Le tout joué par des acteurs qui sont à la hauteur de ce qu'on leur demande de jouer... c'est à dire dans un surjeu assez insupportable. L'Autre Monde, qui raconte l'histoire de Gaspard devenant obsédé par une fille suicidaire adepte du jeu en réseau Black Hole, mêle monde réel et univers virtuel. Un aspect déjà vu et revu en beaucoup mieux. En bref, L'Autre Monde ne nécessite vraiment aucune exploration de votre part. Passez votre chemin sauf si vous êtes insomniaque et à la recherche d'un bon somnifère.
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À défaut de révélations fracassantes sur les moeurs de nos jeunes, L’Autre Monde balance sur son auteur. Sa flagrante méconnaissance de la culture teenage d’aujourd’hui le pousse à en faire une caricature de romantisme sombre qui ferait ricaner les derniers gothiques encore en activité. Les bouleversements identitaires, l’incompréhension des premiers désirs ou des pulsions sexuelles se résument à un peu de touche-pipi et à une puérile d’une mystérieuse femme fatale peroxydée et son avatar. Pire, L’Autre Monde ne joue jamais sur la contamination de la réalité par le virtuel, Marchand s’échinant à dresser des barrières toujours plus importantes entre les deux (le jour, le soleil et les couleurs pour l’un ; la nuit, l’obscurité et la monochromie pour l’autre). Quand il n’ignore pas l’élément-clé des jeux vidéo actuels : le principe d’immersion du joueur. Si l’artificialité des situations et des personnages laisse le spectateur à distance au lieu de l’impliquer, le réalisateur, lui, est englouti par ses influences : Hitchcock, Kubrick mais surtout Lynch, avec d’encombrantes régurgitations de Mulholland Drive et Blue Velvet.
Toutes les critiques de L'Autre Monde
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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La référence au Silencio Club de David Lynch, la relecture d'Alice au pays des Merveilles par Gilles Marchand ne font alors qu'enrichir ce faux teen movie. Une ode à une génération déboussolée par les codes de la Toile, initiatrice aux mystères de la vie.
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Gilles Marchand n'invente rien. On sait que des garçons et des filles se rencontrent sur le Net et prennent des rendez-vous pour se donner la mort. Même s'il montre comment un jeune homme compromet son avenir sentimental et social en se déconnectant de la réalité, L'Autre Monde n'est pas une condamnation de la culture adolescente. Plutôt une nouvelle variation de ce qu'il avait entamé avec son premier film Qui a tué Bambi ? (2003) : l'exploration des inconscients, et ce qu'un conteur peut en tirer.
C'est encore ici le désir de fiction que met en scène Gilles Marchand. Les jeux dangereux qu'il implique. Les ressorts d'une jouissance mentale. A la scène de piscine diurne répond la scène de piscine nocturne, où, nue dans une eau bleutée, Louise Bourgoin convoque le spectre de Marilyn. Marchand est beaucoup plus proche de David Lynch que tous ceux auxquels on le compare, souvent à tort et à travers. -
Gilles Marchand a d'abord fait ses preuves comme scénariste (Ressources humaines, de Laurent Cantet, Harry, un ami qui vous veut du bien, de Dominik Moll). Mais ici, l'histoire qu'il développe compte moins que les images qu'elle engendre. Des visions quasi subliminales, des flashs de cinéma : le bain de minuit dans la piscine du dernier film, inachevé, de Marilyn Monroe, les jeux ultradangereux de voitures de La Fureur de vivre, les figures féminines de Blue Velvet et de Mulholland Drive, de David Lynch... Ces réminiscences émouvantes, grisantes, surgies du va-et-vient fluide entre les deux régimes de réalité, ne cessent de promettre quelque chose - c'est le sujet même. Et Gilles Marchand tient du joueur de flûte, entraînant personnages et spectateurs dans son sillage, retardant au maximum le moment de rendre des comptes. Un fantasme de film ? En tout cas, un beau film de fantasmes.
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Les séquences d'infiltration dans Black Hole distillent un vrai trouble (graphisme minimaliste et élégant) mais, s'il évite le cheap ou le kitsch qu'on pouvait redouter de la part d'un film français lorgnant vers David Cronenberg (eXistenZ), Marchand se complait en revanche dans la dénonciation clicheteuse du virtuel (forcément mortifère et lugubre) opposé à la vraie vie (luminosité et sensualité du Sud de la France). Hormis son discours un poil vieux-jeu, doublé d'une forme trop cliniquement rigide, découpée en blocs hermétiques qui ne laissent pas circuler les sensations, L'Autre monde bénéficie quand même de l'étonnante prestation de Louise Bourgoin, très convaincante en femme fatale.
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Le plus : Le scénario, co-écrit avec Dominik Moll est vraiment amusant et le monde virtuel se révèle très convaincant. L’auteur décrit les jeux plus ou moins dangereux auxquels se livrent les différents personnages de façon fascinante. Il rend aussi très crédible l’évolution du héros. On passe un bon moment en compagnie de comédiens en phase.
Le moins : Certaines séquences entre le héros et sa copine sont trop étirées et l’ensemble, un brin prévisible, manque de subtilité dans la psychologie des personnages secondaires, surtout quand ils sont antipathiques. -
Roman photo policier, "jeuniste" et mou, recyclant les thèmes dans l’air du temps, à peine sauvé par une trame habile.
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Le long-métrage de Gilles Marchand alterne prises de vues réelles et séquences animées. Le film joue sur les oppositions — le soleil de Marseille et la jeunesse joyeuse versus la nuit de Blackhole et ses jeux de rôles pervers — et fait preuve d’une séduisante ambition visuelle. Il y a de beaux moments, des scènes troublantes, comme la baignade nocturne des ados avec Louise Bourgoin, en femme fatale. Les enjeux du scénario se révèlent moins convaincants et les personnages prévisibles.
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Avec L’autre monde, il fait preuve d’une ambition encore plus démesurée puisqu’il confronte des personnages réels au monde virtuel des jeux vidéo en ligne. Thème d’actualité s’il en est, la description d’une réalité parallèle où les névroses du monde réel se trouvent transposées dans la fiction semble avoir passionnée le cinéaste. Malheureusement, l’addition de talents et de bonnes idées ne fait pas forcément les grandes oeuvres. La preuve avec ce voyage virtuel qui manque cruellement de cohérence.
Tout d’abord, l’intrusion du monde virtuel intitulé Black hole ne s’insère jamais harmonieusement dans le récit principal. Malgré des moyens conséquents et une certaine recherche esthétique, les passages animés font davantage songer à l’univers graphique de Tron qu’à celui d’Avalon, sur un sujet similaire. Les habitués des jeux en ligne ne pourront qu’être déçus devant ce pauvre univers virtuel qui leur est proposé ici. Pour ce qui est des scènes live, les amateurs du cinéma des deux co-scénaristes seront étonnés de voir à quel point leur nouvelle création manque de nuance et de maturité. -
Ce ne serait donc que ça, l'autre monde ? Une sublime paire de fesses ? Comme cette métaphore trop prosaïque, L'Autre Monde est un film déceptif de bout en bout. Trop simple, et même carrément simpliste. Curieux, de la part d'un auteur réputé pour ses intrigues à la David Lynch. Tous les personnages manquent de mystère, d'épaisseur et d'ambiguïté. Louise Bourgoin, un peu limitée dans son rôle de Marilyn des Calanques, se laisse manipuler par son frère (Melvil Poupaud, absent) sans piper mot. Grégoire Leprince-Ringuet tombe dans le panneau comme un bleu. Sa copine Pauline Etienne fait preuve d'une mansuétude désarmante à son endroit. Mais le pire est la vision limite réac du monde virtuel et de ses adeptes, vilains pervers ou candidats au suicide. Résonner avec l'actualité ne suffit pas pour être en phase avec son époque. En dépit des somptueuses envolées synthétiques du groupe d'électro d'Antibes M83, les turpitudes des jeunes Marseillais de L'Autre Monde évoquent, en à peine plus noir, un épisode du feuilleton Plus belle la vie.