-
Vinyan est un film trip, hallucinogène, qui suit le voyage au cœur des ténèbres d’un couple au bord de l’implosion. Dès le premier plan, hypnotique, Du Welz renoue avec une certaine forme de fantastique poétique, avec un cinéma sensoriel qui plonge le spectateur dans une torpeur morbide et romantique... L’idée du cinéaste, c’est de pénétrer la lente déchéance d’un couple qui ne peut (veut) pas faire son deuil. Son génie, c’est de suivre les deux points de vue, de ne pas choisir entre la progressive démence de Béart et l’amour sans limite de Sewell, qui suit sa femme jusqu’à la fin. Sous les oripeaux du genre (un peu d’horreur, un peu de gore, un peu de fantastique), Vinyan est un grand mélo, un film d’amour malade qui ausculte la souffrance d’un couple préférant se perdre dans l’illusion plutôt que d’admettre l’irréparable. D’une maîtrise formelle hallucinante (quelque part entre l’énergie folle des premiers Wong Kar-Wai et la beauté classique des Kalatozov), portée par une actrice qui se met en danger dans chaque plan (Béart, époustouflante comme rarement), cette claque confirme le talent radical de Du Welz.
Toutes les critiques de Vinyan
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Ellepar Françoise Delbecq
Ici, tout est noir, la pluie, la gadoue... Un climat d'enfer rendu par une image léchée à l'extrême. On étouffe dans cette végétation où les vivants se perdent, guidés par un mince espoir. La quête de l'enfant unique tourne vite au ridicule. En mère courage, Emmanuelle Béart est parfaitement engluée dans son instinct maternel, elle s'enfonce à grandes enjambées dans une névrose lourde de conséquences.
- Fluctuat
Malgré son atmosphère chiadée et une belle idée de départ autour du deuil, Vinyan et son odyssée mentale tourbillonnante aux confins de la jungle birmane, se révèle une coquille vide et antipathique. On avait laissé Fabrice du Welz torturant gaiement Laurent Lucas dans le surestimé Calvaire, le revoilà sur des terres plus exotiques que sa Belgique natale, la Thaïlande, pour Vinyan. On nous annonce un film trip, une grande odyssée mentale et radicale digne d'Apocalypse Now (rien que ça), une fois de plus beaucoup de bruit pour rien. Après avoir voulu renouveler le survival horror, Du Welz monte en effet d'un cran ses ambitions avec cette histoire de deuil sur fond de quête intimiste et rédemptrice. Le ton est donné dès les premières minutes, le film sera une plongée lourde, pesante, pénétrante, anxiogène, dans l'angoisse de la perte et l'illusion d'une probable retrouvaille. Le pitch ? Un couple dont l'enfant est décédé durant le tsunami de 2004 est resté vivre en Thaïlande dans l'espoir de retrouver leur progéniture. Elle (Emmanuelle Béart, inégale) se persuade d'un kidnapping ; lui (Rufus Sewell, pas mal) est plus sceptique, mais ne peut trahir son épouse par amour. De fil en aiguille ils plongent dans la jungle birmane, aux confins d'un monde surnaturel et étrange entre la vie et la mort.On ne peut enlever à Du Welz certains talents de plasticien, son souci de peaufiner l'image, d'imposer une ambiance entre réalisme et expressionnisme, de tisser en environnement instable, poisseux, menaçant, hostile, illustrant la dérive clinique des personnages. L'intrigue évoluant, les plans sont comme chauffés à blanc par ce traumatisme maternel supposé l'irriguer. De la photo à la bande sonore, Du Welz opte pour l'expérience sensorielle ultime, totale, terroriste. Et voilà la faille : cette quête de vérité hallucinée, jeu sur les frontières mouvantes entre réalité et fantastique, rationalité et folie, n'est qu'un paravent pour cacher le vide sous-jacent du film. A la limite de la prise d'otage, Vinyan doit plus à Gaspar Noé qu'à Coppola. Prétentieux, il n'est jamais à la hauteur de son esthétique, au final suranné. Il se transforme en pensum lourdingue, vidant ou surchargeant ses plans de leurs sens prétendus ou suggérés. Grosse coquille hyper stylisée en quête d'évènement, Vinyan en fait des tonnes pour nous mener en bateau. Atrocement sérieux et poseur, il en devient antipathique malgré ses belles promesses de départ. VinyanDe Fabrice du Welz Avec Emmanuelle Béart, Rufus Sewell, Julie DreyfusSortie en salles le 1er octobre 2008Illus. © The Film / Marcel Hartmann - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire le fil cinéma fantastique sur le blog cinéma