Un Jour sans fin a 25 ans.
Un jour sans fin, sorti aux Etats-Unis il y a 25 ans, marque l'apogée de la relation entre les deux hommes, mais aussi un point de rupture dans leur amitié.
Si Bill Murray a pris pour habitude de s'entourer de fidèles amis de cinéma au cours de sa prestigieuse carrière (Ivan Reitman, Sofia Coppola, Wes Anderson, le scénariste Mitch Glazer...), peu ont eu autant d'influence sur sa carrière que le regretté Harold Ramis, décédé le 24 février 2014. C'est notamment à ce dernier que Murray doit l'un de ses rôles les plus populaires et les plus applaudis, celui de l'imbuvable présentateur Phil Connors dans Un jour sans fin, sorti en salles en 1993.
Cette fable morale que n'aurait pas renié Frank Capra, dans laquelle Murray se retrouve enfermé dans une boucle temporelle l'obligeant à revivre perpétuellement ce fameux "jour de la marmotte", ne fut pourtant qu'un succès modéré lors de sa sortie avec à peine plus de 500 000 entrées en France. Aujourd'hui considéré comme culte, Un jour sans fin reste le chapitre le plus important de l'histoire commune de Bill Murray et de Harold Ramis.
Avant de partager leur même amour de la comédie, Harold Ramis et Bill Murray partageaient la même origine et le même amour pour la ville de Chicago. Ramis y est né en 1944. Bill Murray, de six ans son cadet, est né à Wilmette, à quelques kilomètres de là, et est demeuré un fervent supporter de toutes les équipes sportives de la ville. Les deux hommes, comme beaucoup d'humoristes de leur génération, se rencontrent sur les planches du Second City, un club d'improvisation légendaire d'où sont sortis notamment Mike Myers, Steve Carell, Tina Fey ou encore le futur troisième Ghostbuster Dan Aykroyd.
La naissance de deux stars
Ils y rencontrent notamment un certain John Belushi, qui recrute les deux hommes pour intégrer en 1973 la troupe de l'émission de radio du National Lampoon, une revue de dessins humoristiques également spécialisée dans la production de comédies parodiques, dont certaines devenues cultes comme American College. Le groupe est alors repéré par un jeune et ambitieux producteur du nom de Lorne Michaels, qui veut les faire découvrir au grand public à la télévision dans sa nouvelle émission, le Saturday Night Live. Ramis refuse la proposition, Bill Murray l'accepte.
Cela n'arrêtera cependant pas la collaboration entre les deux hommes, qui ne vont cesser de se croiser par la suite. Acteur, Harold Ramis est aussi un brillant scénariste, et écrit les scripts de plusieurs films portés par Murray. Lancée par Arrête de ramer, t'es sur le sable en 1979, leur collaboration au cinéma leur permet de rencontrer un certain Ivan Reitman, qui les prend sous son aile alors que les deux hommes commencent à connaître ensemble un grand succès populaire, notamment avec le premier film réalisé par Ramis, Le golf en folie en 1980. Reitman sent tout de suite tout le potentiel comique qu'ont les deux hommes lorsqu'ils sont associés ensemble : "Je savais que Harold était mon arme secrète. Bill est un improvisateur de génie, mais il a besoin de Harold, le compositeur plus concentré qui comprend comment écrire un thème et l'orchestrer", confie-t-il au New Yorker en 2004.
Reitman décide alors d'associer les deux hommes devant la caméra. Après un galop d'essai réussi avec le méconnu Les bleus en 1981, il rajoute au duo leur ami Dan Aykroyd pour ce qui deviendra l'un des plus gros succès de l'année 1984, SOS Fantômes, dont Ramis et Aykroyd sont aussi co-scénaristes. Les deux hommes, qui ne se sont pas quittés pendant près de dix ans, deviennent des stars au même moment, Bill Murray en tant qu'acteur, Harold Ramis en tant que scénariste, tout en se retrouvant sur SOS Fantômes 2 en 1989. De cette époque, Ramis gardait le souvenir d'une alchimie naturelle comme il le confiait également au New Yorker en 2004 : "Dans la comédie, on est livrés à nous-même, et il se trouve que je ne veux pas travailler seul. Bill était une incroyable source de force et de sécurité".
Une brouille (quasi) sans fin
Ce qui nous amène à l’année 1991. Les deux hommes se retrouvent pour Un jour sans fin, leur sixième film ensemble, sur un scénario adapté et retravaillé par Ramis à partir d'un script de Danny Rubin. Mais cette fois-ci, les choses ne se passent pas de la même façon et le tournage s'avère électrique. Murray se comporte de manière erratique et multiplie les colères sur le plateau de tournage. Les deux hommes se disputent constamment, principalement sur le ton du film, que Murray trouve trop niais et veut rendre plus provocateur et philosophique. Le co-scénariste du film Danny Rubin garde un souvenir doux-amer du tournage qu'il qualifie en ces termes : "Ils étaient comme deux frères qui n'arrivaient pas à s'entendre". Ces désaccords n'apparaissent pourtant pas à l'écran (bien qu'ils aient pu nourrir la personnalité du taciturne Phil Connors) et n'empêcheront pas le film de connaître le succès (même modeste).
Paradoxalement, l'un des films considérés comme les plus aboutis du duo marquera également leur dernière collaboration. Pendant vingt-et-un ans, les deux hommes ne se parleront quasiment plus. Quand Ramis prépare son film suivant (Mes doubles, ma femme et moi), Murray ne veut même pas en entendre parler et le rôle échoit à Michael Keaton. Même lorsque Ramis tente de renouer les liens en 2005 en proposant à Murray l'un des rôles principaux de sa comédie Faux amis, Murray ne donnera pas suite. Amer, Harold Ramis décrivait l'état de leurs relations en 2009 au site The A. V. Club : "J'ai souvent rêvé de lui et de notre amitié retrouvée. C'était un beau sentiment de réunion. Bill était un type fort. John Belushi l'était aussi auparavant. C'était un roc pour nous. Tu faisais une grosse comédie avec Bill à cette époque en sachant qu'il pouvait sauver même les plus mauvais scripts parce qu'on trouvait quelque chose en improvisant. C'était notre alliance, un peu notre lien. Je pouvais l'aider à être le Bill Murray le plus drôle, et je pense qu'il appréciait cela à l'époque. Je ne sais pas ce qu'il en est devenu, mais cela reste dans nos films. Et quoi qu'il arrive à l'avenir, au moins nous garderons ces moments-là".
Ce n'est que l'an dernier, alors que Harold Ramis souffrait d'une santé déclinante depuis plusieurs années, que les deux anciens amis avaient repris contact et s'étaient réconciliés. Lors de la 86e cérémonie des Oscars, qui s'est tenue moins d'une semaine après la mort de Ramis, Bill Murray était apparu sur scène pour rendre un hommage sobre et sincère à celui qui lui avait offert quelques-uns de ses plus grands succès. Parmi ceux-là, Un jour sans fin trônera toujours en bonne place.
L'histoire d'Un jour sans fin : Phil Connors enrage. Comme tous les ans, parce qu'il présente la météo sur une chaîne de télévision de Pittsburgh, il doit se rendre à Punxsutawney pour une fête locale, le «Groundhog Day», qui célèbre tous les 2 février la fin de l'hibernation des marmottes. Un cameraman, Larry, et une belle productrice, Rita, l'accompagnent. Une tempête de neige les empêche de rentrer le soir même. Furieux, Phil se couche tôt. Le lendemain, il semble être le seul à s'apercevoir que la journée de la veille recommence. Mêmes paroles, mêmes incidents. Chaque matin, le 2 février recommence. D'abord dérouté par ce piétinement du temps, Phil y prend bientôt un certain plaisir. Plus rien n'a de conséquence au-delà du délai d'une journée...
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