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Comme l’annonce le titre, il n’y a pas 36 façons d’échapper à un destin funeste. En sortant de prison pour viol, un homme s’installe en ville, où il rencontre une fille , elle-même pas très bien dans sa tête. La vie avec un violeur incurable: c’est comme si Gaspar Noé avait réalisé un film de trois heures sous l’emprise d’une profonde dépression.
Toutes les critiques de Le Libre Arbitre
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Téléramapar Jacques Morice
Et une pépite de plus ! La nouvelle mine cinématographique qu'est devenue l'Allemagne continue de fournir. Matthias Glasner n'est pas totalement inconnu : on avait déjà vu Sexy Sadie en 1997, portrait violent et sophistiqué d'un psychopathe. On remplace « sophistiqué » par « tendre » et on obtient ce nouveau portrait d'un malade dangereux, doublé d'une histoire d'amour vraiment originale. (...) Le regard du réalisateur est âpre, sans concession et plein d'empathie à la fois. De mémoire, on a rarement vu quelqu'un filmer ainsi une scène de viol, puis une scène d'amour, avec une force égale, crue sans jamais être obscène.
- Paris Matchpar Christine Haas
Malgré la barbarie de la première scène de viol et les moments insoutenables de tension à chaque apparition féminine, Matthias Glasner évite les clichés et le voyeurisme pour s'attacher à l'authenticité émotionnelle. Sans se dérober devant la gravité du sujet, le cinéaste ne perd jamais de vue la dimension humaine de son protagoniste détraqué qu'il accompagne à travers une parenthèse de bonheur, entrecoupée d'irruptions incontrôlables de violence.
- Fluctuat
Sur un sujet casse-gueule (un violeur peut-il rencontrer l'amour ?), Matthias Glasner parvient à imposer une musique douce, lente, attentive à ses personnages (voir l'entretien avec l'impressionnant Jürgen Vogel). Jamais cynique ni racoleur, il ne ménage pas pour autant le spectateur. Troublant.- Voir l'entretien vidéo avec l'acteur Jürgen Vogel - Exprimez-vous sur le forum cinémaPour introduire le récit d'un violeur, certains auraient pris des gants. Matthias Glasner, lui, n'y va pas par quatre chemins : il impose dès l'ouverture une scène de viol sur une plage, avec visage grimaçant de l'homme, cris de la femme et exhibition de plan-séquence. Une telle ouverture, qui ferait presque songer à du Lars Von Trier, pourra sembler complaisante. Mais si Le Libre arbitre s'ouvre sur une forme de cliché, c'est pour mieux l'évacuer et le tordre par la suite. En effet, le choix de faire l'impasse sur neuf années de détention nous fait retrouver Théo (notre violeur) au moment où il entame une longue période de réinsertion. Cette ellipse n'est pas une façon de détourner les yeux mais plutôt de tisser un rapport très particulier entre spectateur et personnage. Ce n'est qu'une fois relâché dans le monde que Théo naît à notre regard ; corps désormais libre, il est investi d'une responsabilité nouvelle. Et cette seconde naissance nous implique intimement. S'il manque explications scientifiques et éléments biographiques pour entièrement cerner Théo, le spectateur veut faire le pari d'une réinsertion réussie.Apprivoiser le coupleThéo est suivi au plus près par la caméra. Ni monstre ni victime, il est avant tout un corps solitaire, auquel Jürgen Vogel prête un imposant magnétisme. Théo est de tous les plans, jusqu'à ce que la caméra croise une autre âme solitaire, Nettie, une jeune femme de 27 ans. Entre eux, le partage d'un espace commun semble possible. Le film s'électrise alors, donnant à voir une fascinante relation, qui ne prend pas son origine dans les sentiments ni dans un réducteur coup de foudre; c'est d'abord l'apprivoisement d'une énergie que recherchent Théo et Nettie.Cette relation vient s'enrichir d'une radicale vision du monde du travail. Théo est employé dans une imprimerie, Nettie travaille en cuisine et la répétition mécanique des mêmes gestes crée une frénésie du montage, qui fait physiquement ressentir un besoin de défoulement et de chaleur. Avant de s'approprier l'autre et d'accepter l'arrivée des sentiments, les amants cherchent à mettre leur énergie en commun. Et Le Libre arbitre devient alors un film sur l'éclosion, l'attente et la construction.Construction patiente d'un style et construction patiente d'une émotion, comme dans la très belle scène de l'église où les personnages, seuls au monde, sont soudain touchés par la grâce d'une musique envoûtante. Mais cette séquence est à double tranchant : elle indique aussi l'impuissance des êtres. Décontenancés face à la beauté et l'innocence, Théo et Nettie ne paraissent pas plus armés contre la violence. Le film peut à cet instant faire le constat d'un certain déterminisme.Quand le corps se manifesteSi le film s'attache à trouver la tendresse lovée en chacun, il maintient une certaine froideur dans son regard. Matthias Glasner décide ainsi de montrer la nudité des personnages et de ne jamais cacher les réactions du corps dans les scènes de sexe ou de violence. Nous sommes pourtant loin d'une ultra-violence provocatrice ; il s'agirait plutôt d'un manifeste, comme si Matthias Glasner cherchait à s'opposer à une certaine esthétique en vogue. Dans cette réappropriation de la réalité du corps, une vitalité nouvelle affleure, loin des images retouchées ou des effets spéciaux.Le Libre arbitre développe, autour des thématiques de la pulsion sexuelle et du sentiment amoureux, quelques idées connues sur l'époque contemporaine (l'omniprésence de l'esthétique publicitaire comme créatrice de manque et de frustration, la déshumanisation croissante des centres commerciaux) mais ils les intègrent à une intense dynamique intérieure, recréant un saisissant « caractère de première fois » à l'aide d' un remarquable couple de comédiens. Le Libre arbitre De Matthias Glasner Avec Jürgen Vogel, Sabine Timoteo, Manfred Zapatka, André Hennicke Sortie en salles les 30 Janvier 2008 Illus. © Jour2fête- Exprimez-vous sur le forum cinéma - Lire le fil réalisateur sur le blog cinéma
Le Mondepar Jean-François RaugerLa lente tentative de conversion et de réinsertion du personnage, convaincante justement en raison du temps que prend le film pour la décrire, est parfois alourdie par une manière un peu systématique de concevoir la société comme un ensemble de sollicitations érotiques, susceptible de faciliter la rechute du malheureux personnage principal. Le film de Mathias Glasner est marqué par un déterminisme pessimiste qui dément l'existence de ce à quoi se réfère son titre.