Cannes 2024 - jour 2
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Tous les jours, le point à chaud en direct du 77e festival de Cannes.

Le film du jour : Furiosa : une saga Max Max (hors compétition)

Neuf ans (déjà ?!) après Fury Road, le miracle a de nouveau eu lieu : un film Mad Max est venu percuter la Croisette et faire tomber les mâchoires des spectateurs sur le sol du Palais des Festivals. Max n’est plus là, mais l’énergie high-octane de la saga métal-hurlante est intacte. Celle du storyteller George Miller aussi ; il prouve en tout cas qu’à l’approche des 80 ans, on peut toujours faire des films pétaradants de santé – une excellente nouvelle pour ceux qui voudraient trépigner encore un peu plus à l’idée de découvrir le Megalopolis du doyen Coppola. Ça y est, Cannes a vraiment commencé – grâce à ce film en forme d’escalier pour le Valhalla.

Notre critique complète de Furiosa

Mad Max Furiosa
Warner Bros.

La corvée du jour : la conf du Deuxième acte

Quentin Dupieux voulait faire vœu de silence pour la promo du Deuxième Acte, sauf qu’après avoir ouvert Cannes il était bien obligé d’honorer la traditionnelle conférence de presse. Mais de fait, le cinéaste n’avait pas grand chose à ajouter. 

"Je suis là pour être poli", a-t-il expliqué en préambule, avant de répondre tant bien que mal aux questions des journalistes, souvent trop terre à terre pour lui, sur le mode du : “J’ai déjà tout dit dans le film”. “C’est un truc que je vais reproduire parce que j’ai l’impression que moins je parle plus les gens ont envie de voir mes films.” 

On n’a donc pas appris grand chose au cours de cet exercice imposé, si ce n’est que les acteurs ont découvert le film en même temps que le public, mardi dans l’enceinte du Grand Théâtre Lumière. “C’est déstabilisant”, a résumé Léa Seydoux, qui a plutôt joué le jeu, à l’inverse de Vincent Lindon, interrogé sur sa proximité avec son personnage : “Je me pose jamais ces questions, ça m’ennuie vous pouvez pas savoir, je ne suis qu’un acteur technique, ce qui m’intéresse c’est comment je suis habillé, quelle est ma voiture, quel est mon prénom… toute la psychologie ne m’intéresse pas du tout.” 

Conf Le deuxième acte
Capture d'écran/Youtube Festival de Cannes

L’interview du jour:  Adam Bessa pour Les Fantômes (Semaine de la Critique)

Dans le premier long métrage de Jonathan Millet, le comédien primé à Un Certain Regard en 2022 pour Harka impressionne en jeune Syrien traquant à Strasbourg un criminel de guerre qui a été son bourreau mais dont il n’a jamais vu le visage. Rencontre express

Les Fantômes est un thriller psychologique qui nous embarque par sa puissance sensorielle. Vous l’aviez ressenti dès la lecture du scénario ?

Oui car elle épouse la quête de mon personnage qui ne connaît de son bourreau que son odeur, sa peau et sa voix. Et c’est ce qui m’a tout de suite emporté. Je tournais les pages et des images et des sons surgissaient. Ce n’était pas une lecture mais une expérience, nourrie par tout le passé de documentariste de Jonathan qui permet d’inscrire cette fiction dans la réalité. Ce qui représentait un défi pour moi. Je savais ainsi que Jonathan avait pensé originellement faire appel à un vrai Syrien et a pu craindre qu’un acteur pourrait dénaturer les choses. Mais dès notre premier échange, on a parlé de nos peurs qui se rejoignaient. Celle de trop en faire pour se situer à la hauteur de l’immensité de cette histoire. Alors qu’il fallait agir à l’inverse: se charger de cette histoire au point de ne quasiment plus rien avoir à faire. Que tout passe par le corps, par l’aspect sensoriel dont vous parliez

Comment on se prépare à cela ?

Par le travail. D’abord sur la langue pour arriver à parler français comme ce Syrien, prof de lettres, qui a appris cette langue dans son pays. Puis en me plongeant dans l’histoire de ce personnage avant que le scénario ne débute, en me documentant sur les tenants et les aboutissants du Printemps Arabe en Syrie, sur les crimes commis par Bachar el- Assad, pour comprendre la source de ce besoin de vengeance que rien ne semble pouvoir arrêter. Et puis, une fois sur le tournage, en ayant une attitude différente de mes habitudes. J’avais demandé à Jonathan qu’on me laisse à l’écart, qu’on ne vienne pas me parler, pour que rien ne vienne me perturber et ne me fasse chuter du fil ténu sur lequel j’évoluais. Je savais que je pouvais perdre le personnage d’un claquement de doigts. Ca a pu créer des tensions avec Jonathan mais comme on les avait anticipés, elles n’ont fait que nourrir mon travail.

Vous avez douté ?

En permanence ! Mais ce doute a été mon meilleur allié car, au fil des jours, d’une simple peur de mal faire, il s’est transformé en signal d’alerte pour me remettre sur le droit chemin que je m’étais fixé

Adam Bessa dans Les Fantômes de Jonathan Millet
Memento

L’anecdote du jour : Meryl Streep est une Quenardos 

Alors ça, c’est vraiment la magie de Cannes : pourrait-on imaginer un autre endroit où Meryl Streep se mettrait à taper la causette à Raphaël Quenard jusqu'au milieu de la nuit ? L'actrice, qui donnait une masterclass dans l'après-midi, a confié avoir adoré Le Deuxième Acte de Quentin Dupieux (qui faisait l'ouverture du festival) et qu'elle s'est couchée à 3 heures du matin mardi soir, car elle a longuement échangé avec l'équipe du film. On ne sait pas de quoi ils ont bien pu discuter, mais on serait très chauds pour que Streep fasse une apparition dans le prochain Dupieux. Pas vous ?

Meryl Streep
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La vidéo du jour : George Miller 

L’artefact du jour : la VHS des Sept samouraïs de Kore-eda

Petite surprise avant la projo du Cannes Classics du jour, Les Sept samouraïs. Invité pour en parler, le cinéaste supercannois Hirokazu Kore-eda (sans film cette année, le gagnant de la Palme 2018 se contente d’être membre du jury de Greta Gerwig) a exhibé un super artefact sur scène : sa VHS des Sept samouraïs, dont il a lui-même composé la jaquette en DIY avec des photos découpées dans quelque journal. Le public a adoré ce surgissement inattendu d’une relique analogique dans le monde numérique actuel, qui est aussi l’incarnation physique de l’admiration que porte Kore-eda pour le film. “Elle date d’il y a quarante ans, je crois que la copie que vous allez voir est de meilleure qualité !”, a rigolé le réalisateur, avant de se lancer dans une déclaration d’amour au classique de Kurosawa à l’aide d’une pile de bouquins sur le sujet ramenés du Japon. Une masterclass riquiqui mais impeccable, parfaite intro au film génial, parfait et inusable de Kurosawa, qu’on a donc revu dans une belle restauration 4K et qui sortira en salles françaises le 3 juillet pour ses 70 ans. Mais si quelqu'un a un magnéto, on est prêts à emprunter aussi la VHS de Kore-eda.

Aujourd'hui à Cannes 

Dites-donc, ce serait pas l'heure de Megalopolis par hasard, le film qui va redémarrer le cinéma ? Francis Ford Coppola fera son retour tant attendu sur la Croisette, en compétition avec ce long-métrage à plus de cent millions de dollars, entièrement financé par les soins du réalisateur (qui a hypothéqué ses vignes pour arriver à réunir l'argent) et où l'on retrouvera Adam Driver, Giancarlo Esposito ou Nathalie Emmanuel. Forcément un événement cannois comme aucun autre. On vous tiendra au courant de ce qu'on en a pensé dès la sortie de la salle.

La compétition accueillera également Bird d'Andrea Arnold, qui fait un come-back après avoir présenté American Honey en 2016 (en compet') et le dérangeant docu Cow (Cannes Première) en 2021. Sur le tapis rouge, on retrouvera notamment Barry Keoghan. Du lourd.

Voilà qui laisse peu de place pour les autres, mais du côté des sélections parallèles, il faudra tout de même surveiller Locust (Semaine de la critique), Les Damnés et On Becoming a Guinea Fowl (Un Certain Regard), Something Old, Something New, Something Borrowed, A son image et le maboul film d'animation The Hyperboreans (Quinzaine des cinéastes) et It Doesn't Matter (Acid).

Cannes 2024 : le guide complet des 22 films en compétition pour la Palme d'Or