The Last of Us : le bouleversant épisode 3 expliqué
HBO

La série HBO a pris, encore une fois, de grandes libertés par rapport au jeu. Pour le meilleur. Les showrunners s'expliquent.

"C'était sidérant de filmer ça ! Comme une étrange anomalie : on a été casté pour cette série incroyable et on s'est retrouvé dans un film de Sundance..." Murray Bartlett (le premier manager, à Hawaii, dans The White Lotus) n'en revient toujours pas ce que fut l'épisode 3 de The Last of Us. Et nous non plus. La série vient de livrer un épisode d'une beauté époustouflante, d'une puissance émotionnelle rarement atteinte en télévision. Un Ovni totalement à part, comme une parenthèse poétique survivaliste, au beau milieu de cette première saison de The Last of Us.



"J'avais ce sentiment que nous aurions besoin, probablement, de faire respirer le public après les deux premiers épisodes très intenses", explique le co-showrunner, Craig Mazin, dans EW. "Je voulais un moyen de montrer une partie du temps qui s'est écoulé, entre le jour où le monde s'est écroulé et le monde en 2023..." La série s'est donc penchée sur un cas (très) particulier, celui de Bill, un paranoïaque solitaire, qui avait anticipé la chute de la civilisation et préparé sa survie post-apo. Ce que Bill n'avait pas prévu, c'est qu'il allait prendre dans ses filets de sécurité l'amour de sa vie : Frank : L'épisode 3 s'est soudainement transformée en love story bouleversante, dévorante.

C'est Peter Hoar, réalisateur britannique, qui a eu l'insigne honneur de diriger cette histoire à part, qui s'imbrique de manière étonnante dans cette de The Last of Us. Le cinéaste a déjà eu l'expérience de raconter des histoires gay poignantes, à travers notamment la mini-série événement de 2021, It's a Sin, tout en étant aussi passé par Umbrella Academy ou Doctor Who : "Je crois qu'ils ont vu en moi un homosexuel qui adore raconter des histoires sur les homosexuels, et qui adore la science-fiction... J'avais le profil idéal" rigole Peter Hoar aujourd'hui dans EW ! Après 20 jours de préparation et 20 jours de tournage à Calgary, au Canada, filmé en décor réel dans un village entièrement construit par le département artistique de la prod, le réalisateur a livré un premier cut de 77 minutes , ramené finalement à 75 minutes... 1h15 pour un épisode, c'est long, mais si "l'épisode n'avait fait que 59 minutes, je pense que toute cette narration n'aurait pas marché."

The Last of Us
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Il est vrai que "Long Long Time" se regarde finalement comme un petit film indé, qui prend le temps de raconter Bill, de raconter Frank, de raconter leur histoire naissante et florissante... jusqu'à un final tragique. Une histoire qui diffère complètement du jeu vidéo et de manière totalement assumée : "Dans le jeu, on nous dit qu'ils étaient "partenaires". Mais ça peut vouloir dire n'importe quoi... Ce n'est que plus tard, une fois que Joel et Ellie s'éloignent, qu'ils trouvent des magazines porno gay sur la banquette arrière et que le tableau se met en place dans la tête du joueur." Mais la série a tenu à faire les choses différemment. Et lorsque Craig Mazin a envoyé son premier jet à Neil Druckmann, il était inquiet de sa réaction. Mais le créateur des jeux et co-showrunner totalement validé, estimant que "ces changements se justifiaient simplement par le bonheur qu'ils offrent en contrepartie ! Ca méritait !"

Mazin a surtout voulu travailler le personnage de Bill, "absolument fascinant", et qu'il voit comme "une sombre prédiction de l'endroit où Joel pourrait finir s'il n'ouvre pas à nouveau son cœur : seul dans une forteresse, paranoïaque et grognon... Avec la série, j'ai voulu changer cette image et donner au contraire un présage d'espoir. Vous pouvez en fait, dans ce monde, encore trouver quelqu'un avec qui partager votre vie. Personne ne vit éternellement, mais le but n'est-il pas simplement d'avoir une belle vie ?

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C'est un peu le message de la fin de l'épisode 3, qui n'hésite pas à tuer Bill, avec Frank. Les deux ont vieilli ensemble, et ont fini par se donner la mort, ensemble, alors que le second est en train de succomber à un cancer en phase terminale. Une happy end romantique et tragique, qui change totalement du jeu, dans lequel seul Frank est mort, quand Joel arrive. Il s'est pendu... parce qu'il ne supportait plus de vivre avec Bill ! "Nous avons beaucoup d'exemples de fins très sombres pour ces relations amoureuses" s'explique Neil Druckmann. "Et c'était vraiment intelligent d'avoir une sorte de fin positive cette fois. Comme un contrepoint (...) Et puis si nous regardons une série et que personne n'a jamais de fin heureuse, quelles sont les chances pour que les personnes qui nous sont chères aient une fin heureuse ? Nous devons savoir qu'il y a une chance que les choses se passent bien, parfois..."

Quant à savoir pourquoi Bill décide, à la fin, de mourir avec son homme, l'acteur Nick Offerman a une explication toute simple : "Lorsque Frank prends sa décision, Bill doit prendre une profonde inspiration. Il sait qu'il ne gagnera pas ce combat. Alors il fait le point et cherche à reprendre le contrôle. C'est un pragmatique, donc c'est donc une décision parfaitement avisée."