La rivière des sens
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Premier long métrage de Ma Xue, La Rivière des sens suit une femme confinée dans son appartement près de Pékin, explorant sa sexualité tandis qu'un mystérieux voisin l'observe à travers un trou dans le mur. Dans un huis clos poétique, le film mêle érotisme et réflexion sur le désir. Rencontre avec la réalisatrice.

A voir ce mercredi au cinéma, La Rivière des sens suit une femme d'une trentaine d'années confinée dans son appartement d'une ville-dortoir près de Pékin. La maladie rôde, l'ennui aussi. Les haut-parleurs interdisent de sortir, alors, dans son appartement, elle explore sa sexualité tandis qu'un mystérieux voisin l'observe à travers un trou dans le mur. Le film tisse une narration énigmatique autour de quatre personnages : deux femmes (dont l'une, plus jeune, s'exprimant en anglais, pourrait être le double de la protagoniste principale) et deux hommes (son mari et son amant). Dans une atmosphère contemplative où les dialogues sont rares, remplacés par des voix off métaphoriques en chinois et en anglais, le film développe une réflexion sur le désir, l'enfermement et la libération.

Quel a été votre parcours avant la réalisation de ce film ?

Après mes études en Chine, je suis partie en Corée me spécialiser en communication. J'ai travaillé pour la chaîne KBS avant de poursuivre un doctorat en théâtre et cinéma, toujours en Corée. Cette formation m'a permis d'approfondir certains aspects théoriques. J'ai ensuite travaillé comme productrice sur des projets de cinéma commercial en Chine, avant de passer à la réalisation en 2020.

Votre film se situe entre la Chine et la Corée. Comment le définiriez-vous : un film chinois ou coréen ?

Je me considère comme une réalisatrice chinoise, étant née en Chine. La Rivière des sens est tourné en chinois avec des acteurs chinois, mais sa production est assurée par une société coréenne. Pour moi, c'est simplement un film international. Quand ils sont allemands, français ou italien, on ne cherche pas systématiquement à étiqueter les coproductions européennes, alors pourquoi le faire pour les films asiatiques ?

Comment avez-vous abordé la dimension érotique du film ?

Je n'ai pas beaucoup d'expérience en tant que spectatrice de films érotiques, ce qui explique peut-être pourquoi mes scènes érotiques sont perçues comme différentes. Pour moi, elles étaient aussi naturelles qu'une scène de repas ou de promenade. Avec mon équipe, le mot "érotisme" n'a jamais été évoqué en réunion. C'était aussi essentiel et naturel que boire ou manger.

Peut-être parce que le véritable sujet du film serait le désir...

Exactement. L'histoire suit une femme ordinaire dont la force intérieure grandit progressivement, révélant son désir. Ce n'est pas un point de départ mais un point d'arrivée, le résultat d'une exploration de soi. L'héroïne abandonne peu à peu la société, les liens familiaux et le monde qui l'entoure pour se retrouver elle-même. Le film réfléchit à la façon dont les êtres humains, malgré leur insignifiance face à l'univers, peuvent devenir incroyablement forts.

La Riviere des sens
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Quelle fut votre approche esthétique ?

Je recherche la beauté dans mes images. La sexualité et l'érotisme peuvent devenir une forme d'art cinématographique, sans être nécessairement sombres ou vulgaires, même lorsque les relations entre les personnages sont complexes.

Pourquoi avoir inclus un portrait de Catherine II de Georges Desmarées qui joue un rôle étonnant dans le film ?

C'est un clin d'œil à cette figure historique fascinante. Placer son portrait dans le foyer d'un couple ordinaire chinois crée un décalage intéressant. À travers son regard, on suggère l'immensité possible de l'univers d'une femme, même dans un contexte apparemment limité.

L'humour occupe une place surprenante dans le film...

En effet, j'aime jouer avec les symboles d'une manière légère, comme avec le portrait de Catherine II. L'humour est essentiel dans mon film, il équilibre les aspects plus dramatiques de l'histoire.

La Nouvelle Vague française vous a-t-elle influencée ?

Je parlerais plutôt de convergence créative. C'est en terminant le film et en écoutant les critiques que j'ai réalisé ces similitudes avec certains grands prédécesseurs. Les cinéastes de la Nouvelle Vague, particulièrement Bresson et Rohmer, sont comme des amis artistiques que je rencontre après leur disparition.

Quels sont vos projets futurs ?

J'ai déjà écrit quelques scénarios de longs métrages. Je suis ouverte à l'idée de travailler avec des acteurs étrangers, notamment français. Mes nouveaux personnages ne sont pas nécessairement pensés pour des acteurs chinois, ce qui ouvre la voie à des films plus internationaux.



Synopsis officiel : Durant la période de confinement liée à l'épidémie en Chine, de nombreuses personnes ont non seulement changé leur mode de vie, mais ont également ouvert les portes du désir et de l'exploration de soi. Yang Fan vit à Yanjiao, ville séparée de Pékin par la « rivière blanche ». Sa routine faite de tâches ménagères et de respect des règles sanitaires est bouleversée lorsqu'elle se retrouve entraînée dans un réseau érotique impliquant son mari et un jeune serveur mystérieux.

La Rivière des sens sort mercredi 15 janvier en salles.

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