Cannes jour 5 : Karla Sofía Gascón au bras de Jacques Audiard
Abaca

Le réalisateur français est vivement critiqué au Mexique pour son film tourné en langue espagnole.

Depuis plusieurs mois, Emilia Perez fait l’objet d’une vive polémique dans le monde latino. Le film de Jacques Audiard, qui s’attaque aux sujets de la transidentité et du narcotrafic sous la forme d’une comédie musicale colorée, choque au Mexique. Et le succès du film, qui a triomphé aux Golden Globes et fait partie des favoris des Oscars, ne fait qu’envenimer la situation. 

En résumé, on reproche à Emilia Perez de dépeindre de manière trop légère un sujet très grave : les disparitions de masse liées aux cartels de la drogue. Le tout en ayant été tourné en France, avec un casting essentiellement non-mexicain, en dehors du second rôle joué par Adriana Paz. Selena Gomez, actrice américaine d’origine mexicaine, a elle aussi été prise pour cible. Elle a dû apprendre l’espagnol pour le film, et son accent a fait grincer les oreilles des hispanophones. 

Mais le gros des critiques porte évidemment sur Jacques Audiard et sa vision du Mexique. Il y a quelques mois, le réalisateur français avait reconnu lors d’une interview qu’il n’avait pas vraiment étudié la question avant de se lancer sur le projet : "Ce que j’avais à comprendre je le savais". Une citation malheureuse qui tourne en boucle sur les réseaux sociaux. 

Jacques Audiard était présent cette semaine à Mexico pour la première du film, qui sortira enfin au Mexique le 23 janvier. Au micro de la version espagnole de CNN, le cinéaste a accepté de répondre aux critiques, justifiant pourquoi il avait choisi de situer son film au Mexique et de le tourner en espagnol, ainsi que son rapport au réel :

"Les narcotraficants ils sont quand même mexicains, ou colombiens. J'aurai pu le situer ailleurs, mais le personnage du roman de Boris Razon était mexicain. Et j'avais envie d'un opéra en espagnol, j'adore la langue espagnole, j'adore le chant espagnol et je ne parle pas du tout espagnol. 

Si je dois choisir entre l’histoire et la légende, je préfère écrire la légende, Ce que je veux dire c’est qu’à partir du moment où tu te situes dans une forme qui serait l’opéra, on n’est pas dans un système de réalisme. 

Si des choses vous paraissent choquantes dans Emilia, je serai prêt à m’excuser. Je suis bien désolé. Le cinéma ça n’apporte pas de réponses, le cinéma pose des questions. Peut-être que les questions que pose Emilia sont déplacées, je ne sais pas. Mais je ne les trouves pas inintéressantes. Je ne veux pas être prétentieux, mais il y a quelque chose dans les thèmes d’Emilia qui est universel.


Ce petit mea culpa ne semble pas trouver un écho favorable auprès des internautes. Mais il faut noter que des voix s’élèvent aussi pour défendre Emilia Perez au Mexique. Guillermo Del Toro, grand fan de Jacques Audiard, avait ainsi loué le réalisateur français et son film lors d’une projection en public

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